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 [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar"

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MessageSujet: [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar"   [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar" EmptyLun 17 Sep - 21:16

Well, show me the way

to the next whiskey bar
Tara O. Matthews & Ezékiel T. Erikson

J’envisage d’arrêter les cours, de me laisser pousser la barbe, et de rejoindre un cirque.



Le bruit d’un réveil, le soleil sur mon visage, un grognement au fond de ma gorge.
Merde.
Je lutte un instant, tente de retomber dans la douceur de l’inconscience, de faire abstraction du son strident au creux de mon oreille. Mais y a rien à faire. Putain de réveil. Putain de jour qui se lève. Putain de monde qui continue de tourner sans moi. J’ai les yeux remplis de sommeil, le cerveau dans un étau de coton. Assis sur le bord de mon lit, je passe une main dans mes cheveux, peut-être pour tenter de réveiller mes neurones noyés dans les brumes de l’alcool ou bien seulement pour vérifier que ma tête est encore là, en équilibre instable, juché sur le haut de mes vertèbres.
Je ne sais plus qui je suis, où je suis. Je ne sais plus quel jour on est. Je ne sais plus rien. Seulement qu’il est trop tôt pour les gens normaux. Pour les gens comme moi. J’aspire à disparaitre, engloutie par la blancheur de ma couette. Me faire avaler tout cru par le monde des merveilles. Je voudrais militer pour mon droit au sommeil réparateur. Mais il est trop tard pour ça. Alors dans un bayement je me mets en branle. L’étirement de mon dos réveille en moi les courbatures d’une nuit trop mouvementée dont j’ignore les tenants et les aboutissants.
Ma gueule dans le miroir m’arrache une grimace. Je ressemble à un squelette à la Tim Burton, un mister Jack défiguré. Trop d’abus, trop d’alcool, trop de jeunesse consommée. Rien à foutre. De mes cernes, de mes yeux rouges, de mon visage décharné. Rien à foutre de tout ça. On ne vit qu’une fois.
Jolie philosophie mais qui ne fait pas disparaitre les vertiges de mon état, le trouble dans mon estomac, l’aigreur dans mon œsophage. J’ai la gueule de bois et les souvenir qui se sont fait la male. Incapable de mettre des images sur mes écarts de la veille. Une soirée comme une autre. Une soirée perdue dans les restes de ma mémoire. Allez savoir ce que sera ma vie. Un vaste gruyère de souvenir. Des instants égarés. Je me prépare dignement pour Alzheimer, la vieillesse ne me fait pas peur, j’en savoure déjà tous les symptômes.
Sur le sol de ma piaule trainent t-shirts crades et jeans troués. J’attrape ce qui me passe sous la main, tente de tomber sur les moins sales. Un haut blanc presque immaculé, un pantalon presque entier, on pourrait presque me prendre pour monsieur tout le monde. Celui qui va bosser tout les matins en souriant, qui enchaine la routine de sa pathétique petite vie sans jamais se poser de question. Monsieur tout le monde : l’homme que je ne serais jamais. Je pris tous les soirs devant mes verres de vodka pour que cela n’arrive pas. Une paire de lunette noire vient parfaire mon accoutrement, dissimulant adroitement les stigmates de mon état.
La maison est silence, qu’elle dorme encore ou qu’elle ait été depuis longtemps abandonné, cela m’indiffère. Je la traverse comme un automate. Pas le temps, pas l’envie, pas même l’idée de caler quelque chose au creux de mon ventre. Trop de risque que tout cela repartent dans l’autre sens pour aller décorer les jolis murs blancs.
Mes pieds me portent jusqu’à l’arrêt de bus pendant que mon cerveau reste en stand bye. Ne penser à rien, il parait que c’est impossible. Et pourtant j’ai l’étrange impression d’abriter le néant entre mes deux tympans. Un vide abyssal libérateur. Je ne réfléchis pas, j’agis. Comme souvent. Comme toujours. Peut-être juste plus clairement que d’habitude. Est-ce que je sais seulement où je vais ? Peut-être bien. Une vague idée, un pressentiment ou alors un automatisme à la con qui me guide vers mon destin. Le trajet défile et surgit devant moi, rayonnante de toute sa splendeur, la faculté de droit. Architecture insipide, ici le gris se mêle au gris. Joyeux camaïeux. A croire que le savoir ne tolère pas la fantaisie. Non pour nous il n’y aura rien d’autre que la tristesse du béton. Bienvenue aux étudiants.
Dix heures à ma montre. Un miracle comme un autre, je suis en avance. Shooté, amorphe, surement encore un peu remplie d’alcool, mais en avance. A prendre ou à laisser, je n’ai rien de mieux à proposer. Je suis là, c’est déjà ça non ? Il faudra bien s’en contenter. Je suis sur que ma partenaire commis d’office, sera noter le point positif de toute cette histoire. J’aurais aussi pu ne pas être là.

En l’attendant, assis sur un banc je regarde le monde. Le vide total et transcendant du monde. La fac ressemble à une fourmilière en ébullition. L’intercours, ce moment étrange et fascinant où tous les petits étudiants sages et disciplinés se précipitent d’une salle à une autre, pressés de s’amasser dans une pièce exigu. Ils attendent qu’on leur bourre le crâne avec tout en tas de conneries bien préparées. On leur fait croire bien gentiment que tout cela leur servira. Et eux ils sourient comme des cons et ils en redemandent. Pythagore a son heure de gloire. Ça me donne la nausée de penser que c’est tout ce qu’ils ont à nous offrir. Des leçons prédigérées pour gosses attardés. Ça me donne la nausée de penser que c’est ça qui fait tourner le monde. Sérieusement qu’est ce qu’on en a à foutre ?! Je ne veux pas me nourrir de tout leur savoir. Je ne veux pas comprendre le monde. Ça ne sert à rien. Je veux le vivre, le sentir. Je veux le tenir au creux de mes mains. Sauf que Santa Monica n’est pas le monde. Ce n’est qu’un putain de quartier où rien n’a d’intérêt. Les événements qui s’y passent glisse sur moi avec ennui. Encore plus ici. Entre les quatre murs de cette université aseptisée. Leurs leçons à deux balles ne font que ternir l’éclat des choses. Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui je ne veux pas y penser. Pas maintenant, pas tout de suite. Aujourd’hui j’observe. J’observe cette petite blonde aux grands yeux écarquillés qui semble lutter dans une jungle hostile. Elle a renversé ces cours sur le sol et tente tant bien que mal de les préserver de la masse. Pauvre petite chose. J’observe ce connard en costard. Vingt ans, trois poile sur la bite et ça se prend pour un homme, un vrai. C’est écrit sur sa gueule qu’il se croit supérieur. Il se croit l’élite de la nation. Le roi du monde animal. Futur partisan de la majorité bien pensante, il deviendra juge ou avocat et trouvera sa jouissance dans la condamnation de ceux qui ne suivent pas les règles de son monde trop étriqué. Pauvre petite chose. J’observe la foule, la vie, et rien de tout ça ne me concerne. Parce que je ne le veux pas sans doute. Pas parce que je vaux mieux, non ! Parce que je vaux moins, bien moins qu’eux. Depuis le jour où j’ai décidé que plus rien n’avait d’importance. Et pourtant je ne veux pas leur ressembler, pour rien au monde. Tout cela me semble vide d’intérêt. L’alcool qui pulse encore dans mes veines n’est peut-être pas étranger à toute cette affaire. J’ai l’impression d’être en dehors de tout comme si un voile me coupait de leur réalité. Je suis peut-être devenu invisible, passé dans une autre dimension. J’attends qu’on vienne me ramener sur terre mais personne ne veut se dévouer. Et puis ça y est, il n’y a plus personne. Les moutons sont tous bien rentrés dans la bergerie. Je suis tout seul. Abandonné. Tranquille. Assis sur mon banc je regarde le monde. Le vide total et transcendant du monde. La fac semble délaissée. Je penche la tête en arrière. Scrute les nuages, contemple le ciel. Qui n’a manifestement rien de plus à m’offrir. Tant pis.

Et puis elle arrive. Un putain d’ange. S’il ressemble tous à ça je crois que je veux bien aller au paradis avec tout les bien pensants. Regardez-moi ses cheveux ! Regardez-moi ses jambes, rien qu’à les voir j’ai un tas d’idées peu catholiques qui me monte au cerveau ! Mais c’est pas un ange. C’est Tara. Elle n’est pas loin des être céleste vu sa bonté d’âme mais elle reste humaine. Du moins je crois. Sacrée apparition. Bizarre que je pense ça d’ailleurs. Pas le genre de fille que je remarque. Trop différente de celle qui m’attire et pourtant avec les restes de vodka je dois bien reconnaitre qu’elle est mignonne la donzelle. Mais je ne fais pas de commentaire, un exploit en soi, ne pas faire de remarque vulgaire, ça ne me ressemble pas. Je la laisse juste approcher. J’attends.
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MessageSujet: Re: [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar"   [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar" EmptyVen 21 Sep - 1:08

Sa silhouette se confond dans la masse, petit être humain recroquevillé, les vêtements sans éclat. Mais son ombre est différente, ce qu’il dégage repousse, refreine. Mes pas se succèdent et la réflexion suit ma trajectoire. Je pourrais lui trouver un charme, au sein de sa désinvolture et de son sourire futé. Mais j’déteste les gens aux morales sans limites, aux « je-m’en-foutisme » absolus et aux fuites du réel démesurées. Le sexe, l’alcool, la drogue et l’argent. Petits motifs qui berce sa vie, qui entrecroise seulement la mienne. J’extirpe mon cellulaire de ma poche, un écran incandescent qui imprègne les chiffres 10 :00 à mes rétines. Je repousse l’appareil au fond de mes pantalons, là où mes mains se terrent dans une chaleur réconfortante. Gauche, droite, gauche, droite. Le gazon absorbe mon poids, craquant de sècheresse. Je lève la main pour m’annoncer, sans bonheur ou malheur. Dans la monotonie la plus partiale. Son allure est classique, plutôt trompeuse sur l’état miteux qu’elle camoufle. L’odeur sans saveur, l’intuition envers sa gestuel trahis son apparence saine. Je penche la tête sur le côté, petit reflexe de jouer la comédie de mon ironie, sans restriction à parler, à lui offrir un accueil digne de moi. Digne de mes paroles franches, de mon sarcasme léger.

    TARA – « T’as l’air en forme. Pour faire changement. »

Ça n’a rien d’agressif, qu’une sincérité tranchante. J’ose même un sourire, parce que je sais qu’il assume ses débauches et ses délires. Son atout principal, d’accepter ce qu’il est, ce qu’il fait. J’abandonne mon sac d’école à mes pieds, bruit minime aux murmures qui glissent autour de nous, aux pas qui martèlent le sol, aux voitures qui grattent l’asphalte. Le banc est inconfortable, un béton dur et sans ergonomie. Je garde mes paumes contre mes genoux, les coudes tendus, les muscles raidis d’un inconfort que je hurle muettement. J’agrippe un livre, devant son inactivité. C’est un travail d’équipe, pour un duo dissocié. On n’a rien en commun, on s’emboîte, sans jamais se rejoindre. Je plisse le front à l’observer, à l’analyser. Sans jugement, mais avec des interrogations qui me brillent au fond des yeux.

    TARA – « J’peux te poser une question, honnêtement? Pourquoi t’étudie le droit, si tu ne crois qu’en ta justice, si tu préfères t’isoler de la société que de l’aider? »

Je ne le connais pas. Que des bribes de vécus que j’accumule pour former un schéma grossier, imparfait. Alors je questionne, sans attente. L’esprit ouvert à découvrir, à être surprise, ou déçue. La curiosité brille dans ma voix, l’âme d’une enfant que tout étonne, que tout chamboule. Je vis malgré moi, petite victime de mes sentiments. Mes doigts frôlent la couverture du livre, couleurs éclatantes qui captent mon regard en attendant la suite. La réponse sérieuse ou l’insulte gratuite. Le mélange probablement bien dosé des deux. Parce qu’Ezékiel est provocateur et rebel – au plus profond de son âme – mais pas débile. Sa logique à lui n’est simplement pas atteignable pour moi, pas encore. Je pousse mes cheveux derrière mon oreille; grande combattive du vent qui m’assaille. Ma patience s’estompe, mes yeux cherchent les siens, derrière la barrière de ses lunettes fumées. J’adore cerner les gens, grande facilité à capter leurs volontés et leurs émotions. Tout m’est interdit pour Ezékiel, qu’un mystère ambulant que je provoque, que je bouscule. Les secondes s’évadent dans un faux silence, dans une cacophonie bourdonnante.

    TARA – « Tu t’es déjà posé la question? Sans alcool et sans drogue dans le sang? »

Ma fossette se creuse, petit réflexe d’une légèreté d’esprit. La liberté d’une relation qui n’a rien d’amicale, qui n’engendre rien. Qui n’est qu’un moment d’une vie qu’on oubliera, ou qu’on négligera. Parce que le futur n’en dépendra pas. Un crayon tourne entre mes doigts, petite studieuse qui s’agite, qui prend les devants. J’ai déjà l’idée du projet – petite merveille qui surprendra la négligence de notre société. Mais j’ai envie d’entendre l’option du jeune Erikson, parce qu’il n’est pas travailleur, pas appliqué. Qu’il pense pour lui, mais qu’il pense bien. Que ses idées aussi déplaisantes soient-elles, brûlent d’ingéniosité et de témérité. J’admire et je décourage, petite alliance qui me laisse dans un soupir bruyant, l’air roulant sur mes lèvres sèches.
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MessageSujet: Re: [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar"   [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar" EmptyMar 2 Oct - 22:05

Well, show me the way

to the next whiskey bar
Tara O. Matthews & Ezékiel T. Erikson

J’envisage d’arrêter les cours, de me laisser pousser la barbe, et de rejoindre un cirque.



Elle semble si heureuse d’être là. Si heureuse d’être avec moi. Douce ironie qui percute mon esprit. En réalité il n’y a qu’une neutralité désespérante dans son entrée en scène. Nous allons jouer à « deux blasés sur un banc ». Jeu intéressant ? Peut-être. Je n’ai pas l’habitude d’y jouer. Les gens restent rarement amorphes en ma présence. Un don que j’ai. Pousser les pauvres innocents dans leur retranchement. Ils devraient me remercier, je leur évite l’aphasie. «T’as l’air en forme. Pour faire changement.» Son sarcasme ramène la norme. Ça c’est Tara. Tara et son jugement. Tara et sa morale bien pensante. Tara et sa volonté de sauver le monde même si cela veut dire sauver des idiots comme moi. Je me contente de lui sourire. De toute ma fierté. De toute mon assurance. Parce que j’aime ma débauche. Et que j’assume ce que je suis. Toujours. Ou presque toujours. Je la nargue un peu. Parce que je le vaux bien. Parce qu’elle le cherche sûrement. Je ne serais pas Teddy Erikson si je ne savais pas répondre avec ma petite provocation personnelle. Et encore. Aujourd’hui je joue petit. Ce n’est que le temps de l’échauffement. Laissez-moi le temps de me mettre en jambe et je vous vendrais du rêve par paquet de douze. Laissez-moi le temps de rassembler mon éloquence noyée dans l’alcool qui hydrate mes veines. Et dans le sourire qu’elle m’offre en retour je pourrais presque croire à de la tendresse. Même si ce n’en est pas. Elle s’est juste fait une raison. Elle sait que je ne connais pas la honte. Pas de tendresse pour moi. Elle ne doit pas m’en juger digne. Après tout je ne fais que l’exaspérer. J’aime ça que voulez-vous.

Elle vient me rejoindre sur mon banc trop dur. Et elle rêverait d’être ailleurs. Tous ses muscles le crient. Mais ils peuvent crier encore un peu, je n’ai pas envi de bouger. Pas envi de lui proposer un ailleurs plus confortable pour elle, moi et nos cours de droits. Nos cours ne le méritent pas. Et la froideur du béton la découragera peut-être de nous faire trimer trop longtemps sur des problèmes qui m’indiffèrent. J’aspire à mon lit. Il ne me reste plus qu’à lui faire désirer la même chose. Enfin non. Pas tout à fait. Je ne veux pas qu’elle désire mon lit, juste le sien. Quoi que…
Mais j’en suis là de mes pensés lubriques quand elle, déjà, se focalise sur le pourquoi du comment de notre venu ici. Elle sort un livre dont la simple vue déjà me désespère. Putain de droit. Putain d’étude. « J’peux te poser une question, honnêtement? Pourquoi t’étudie le droit, si tu ne crois qu’en ta justice, si tu préfères t’isoler de la société que de l’aider? » J’hausse les sourcils surpris. La belle a changé de majeur ? Elle se croit en psychologie ou une connerie du genre ? Je dois être un nouveau cas d’étude. Remarquez, je pourrais comprendre, après tout je suis fascinant. Sauf que Tara ne me trouve pas fascinant. La plus part du temps elle me trouve juste ennuyant. Alors pourquoi tout d’un coup s’intéresser à moi ? Pourquoi vouloir faire de moi plus que le gars insupportable qu’elle se doit de fréquenter pour ne pas plomber sa moyenne ? Je suis sceptique. Peut-être essaye-t-elle de me soutirer des informations pour ensuite me ramener dans le droit chemin. Je suis sur qu’elle en est capable. Peut-être pas avec moi mais avec les autres… Je suis sur qu’avec un peu de connaissance de l’autre elle parvient à être très persuasive. Elle devrait peut-être créer une secte. Une secte qui ferait des pauvres loosers dans mon genre des gens bien. Le plus sur est encore de me méfier. C’est l’alcool au fond de moi qui parle. Je ne veux pas, sous aucun prétexte devenir quelqu’un de bien.

« Tu t’es déjà posé la question? Sans alcool et sans drogue dans le sang? ». D’une simple phrase elle vient de faire disparaitre la moitié de mon existence. Même pas sur qu’elle s’en rende compte. C’est qu’elle est sérieuse dans ses questions. Elle veut vraiment savoir. Et moi je ne suis pas sur de vouloir lui répondre. D’ailleurs lui répondre pour lui dire quoi ? Que j’ai tiré à pile ou face entre droit et boulanger et que la pièce est tombée sur face ? Que je ne sais pas ce que je fous là mais qu’ici ou ailleurs ça ne change pas grand-chose à ma vie ? Ou alors trouver quelque chose de plus glamour ? De plus provoquant ? Lui dire, peut-être, que je n’apprends la loi que pour mieux la contourner. Tant de mensonge à inventer. La vérité elle-même ne sera jamais à ses yeux qu’un mensonge. Elle ne peut pas me comprendre. Alors je préfère prendre une autre approche. Moi aussi je veux des réponses à mes questions. Le tout est de savoir qui apprendra ce qu’il veut apprendre en premier. Parce qu’il ne faut pas crorie, à sa façon aussi elle m’intrigue la petite Tara. J’aimerais comprendre d’où lui vienne toutes ces illusions sur le genre humain. Toute cette confiance qu’elle a en eux. « Tu crois sincèrement que les gens qui sont ici, font droit dans le but d’aider la société ? » Je ne peux m’empêcher de lâcher un rire léger sur cette question. Douce Tara, candide Tara, mais dans quel monde vis tu ? « la moitié des connards de notre promo ne posent leur cul en amphi que parce qu’ils ont la certitude qu’ils décrocheront plus tard un boulot qui paye bien. » Le pire c’est que je ne mens pas. Triste vie n’est-ce pas ? J’ai au moins la décence de ne pas faire semblant. Tout le monde c’est bien que je ne fais pas ça pour sauver la veuve et l’orphelin. J’ai l’honnêteté de mon profond égoïsme. Tout le monde ne peut pas en dire autant. « T’es mignonne Tara mais même toi tu peux pas être suffisamment conne pour croire qu’on fait droit juste pour sauver le monde, si ? » Première insulte, premier coup porté. Je veux la faire bouger, réagir. Lui faire ouvrir les yeux sur cette réalité dans laquelle nous vivons. Allez savoir pourquoi ? Après tout elle pourrait vivre dans ses illusions qu’est ce que cela changerait pour moi ? Rien. Et pourtant, même si ça ne me ressemble pas, il y a quelque chose en moi qui veut entendre Tara admettre qu’elle n’est pas si naïve. Qu’elle aussi se ment à elle-même, sur ce que nous sommes vraiment, nous, les humains. « Alors pour répondre à ta question, on a qu’à dire que je suis le moins hypocrite de la bande. J’fais droit parce que je peux le faire et que ça les emmerde quand même un peu de voir qu’un gars comme moi s’en sort mieux qu’eux sans en glander une » C’est même pas faux. Il me regarde avec mépris et pourtant ils doivent bien le reconnaitre, je suis loin d’être con. Je suis là pour leur rappeler à tous que leur supériorité est bien dérisoire. Ils ne sont pas l’élite de la nation parce que s’ils le sont je le suis aussi. Voila une raison parmi tant d’autre de faire droit. Je viens de l’inventer celle là. Mais Tara a une telle image de moi qu’elle devrait y croire. Après tout pourquoi pas. Ça ou autre choses, tu as encore du chemin à faire gamine, pour comprendre le mystère que je représente.
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MessageSujet: Re: [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar"   [Tara & Teddy]"Well, show me the way to the next whiskey bar" EmptyVen 30 Nov - 3:10

    EZEKIEL - « Tu crois sincèrement que les gens qui sont ici, font droit dans le but d’aider la société ? »

Je grimace, c’est plus fort que moi. J’ai compris depuis trop longtemps qu’on ne vivait pas dans un monde parfait. Je ne réponds rien, le silence est d’or sur une vérité ancrée. Son rire résonne à mes tympans comme une victoire personnellement octroyée. Si ça lui fait plaisir de voir tout en noir, de classifier l’humain de bestial sans nuance. On me croit naïve, une petite âme pure qui erre dans un monde d’effroi et de déchéance. Rien de nouveau. Je détourne le regard, sur un gazon trop vert. J’ai plus envie de m’expliquer, plus envie de débattre une opinion qu’on ignorera. C’est facile de tomber dans les stéréotypes. Et les gens préfèrent la facilité. Alors j’arbore un air neutre, derrière mon esprit enragé.

Je serre les poings, pour conserver ce contrôle de moi-même, pour étouffer cette colère qui n’a pas de raison. Qui émerge comme ça, quand le poids des autres est trop pesant. Je dois dégager un abandon, un relâchement. J’ai l’air faible, délicate, fragile. Ce n’est qu’un costume, ce n’est qu’une carcasse qui transporte l’important. Ezékiel continue, renchérit. Et j’écoute, sa voix rocailleuse et dérisoire, mêlée au brouhaha qui nous entoure, qui nous inonde.


    EZEKIEL - « La moitié des connards de notre promo ne posent leur cul en amphi que parce qu’ils ont la certitude qu’ils décrocheront plus tard un boulot qui paye bien. »
    TARA – « Mais pas toi. Ce qui me ramène encore une fois à la fameuse question, pourquoi le droit? »

Je sais qu’il ne répondra pas. Mais mon regard le fixe, lui et son regard masqué. J’voudrais capter ses iris, mais le verre teinté ne reflète que mon entêtement. Je croise mes bras contre ma poitrine, laissant le vent massacrer mes cheveux. Mes pieds se balancent dans le vide, geste répétitif qui éclaircit mes idées, m’entraînant bien loin, dans des songes éveillés. Deviner ce qui suivra, anticiper la réponse. Petit mystère qui me motive dans mon attente. Le livre glisse contre mes genoux, d’une lenteur paniquante. Mes doigts se crispent contre la couverture, sur la fraîcheur d’une surface lisse. Les paumes à plat sur des connaissances. Mais ce que je veux savoir, à l’instant, se trouve entre les deux oreilles du jeune Erikson. J’ose un sourire en coin, les pupilles étincelantes, une fossette se creusant contre l’amusement de mon visage.

    EZEKIEL - « T’es mignonne Tara mais même toi tu peux pas être suffisamment conne pour croire qu’on fait droit juste pour sauver le monde, si ? »
    TARA – « Juste? « Juste » pour sauver le monde? J’trouvais ça suffisant de simplement essayer. »

Vivre et mourir. Chronologie indubitable qui schématise l’humanité en entier. Sans exception. On est des gamins qui s’argumentent avec de jolis mots. Nos intonations se font miroir. La fierté perle chaque fin de phrase, notre enthousiasme à étaler notre point de vue transparaît dans toutes nos syllabes. Du tact-au-tact, sur l’impulsivité du moment. J’oublie le travail scolaire, le débat réel qu’on abordera pour obtenir une note, pour avoir un crédit, pour décrocher un diplôme. C’est un jeu, et comme d’habitude, je suis mauvaise perdante…

    EZEKIEL - « Alors pour répondre à ta question, on a qu’à dire que je suis le moins hypocrite de la bande. J’fais droit parce que je peux le faire et que ça les emmerde quand même un peu de voir qu’un gars comme moi s’en sort mieux qu’eux sans en glander une. »
    TARA – « Oh wow, graduer en droits pour faire chier les autres… Sérieusement, évolue de ta crise d’adolescence… »

Mon front se plisse de le découvrir si enfantin. D’accorder autant d’importance sur les autres dans un sens aussi pessimiste. J’voudrais lui offrir une gifle, pour le sortir de sa léthargie. Grandis un peu. La déception empourpre mes joues. Il ment sûrement, il embellit la plate vérité. Parce que sincèrement, vivre pour les autres, ça n’a rien de motivant, ça n’a rien de grandiose. C’est même plutôt pathétique. Je laisse mes souliers râcler le sol; petit nuage de poussière qui se soulève à mes mouvements concentriques. Et c’est plus fort que moi, mes lèvres s’entrouvrent, ma respiration s’accélère. Mes pensées se débitent trop vite, ma voix se fait écho dans l’ennui des lieux.

    TARA – « On va tous crever, tu sais. Et je crois pas en Dieu, en sa miséricorde; son paradis et son enfer. Alors j’ai envie de faire la justice ici, sur terre. Parce qu’on vit entre hommes – sans Dieu – et qu’après la mort, si tu veux mon avis, c’est que le néant. Alors c’est ici, maintenant, que les gens devraient payer. »

C’est peut-être la justice à son état pur, sans le réalisme des cas contraires. Parce que plusieurs coupables échappent aux barreaux et que certains innocents les subissent. Mais rien n’est parfait, jamais. Alors on fait au mieux. Je déglutis, la gorge sèche de mon discours arduement balancé. Et plus j’entends les bribes de ce que j’ai dit, plus le vide de réaction de sa part gonfle dans ma poitrine. Petit mélange de rage et de malaise. Je finis par soupirer, bruyamment. Laissant mes yeux naviguer sur le livre qui s’étale encore contre mes genoux.

    TARA – « Oublie, tu peux pas comprendre… On devrait peut-être se séparer le travail, faire chacun notre partie de notre côté? Je, j’crois pas qu’on réussisse à s’entendre sur grand chose… »



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