Moins de dix jours, c’était le temps qu’il avait fallu à Erik pour retrouver Lou-Ann et pour la blesser, encore une fois. Il était de retours à Los Angeles depuis moins de deux semaines et il avait déjà réussi à faire une connerie. Chose rare, il l’avait fait volontairement, du moins il pensait avoir fait une bonne chose. Il pensait que le choix qu’il avait fait, faire apparaître ses sentiments pour la jeune fille tout en se cachant et en fuyant, était le bon. En fait, il pensait que le fait de fuir était bon. Était-ce vrai, peu de gens peuvent le savoir. Mais, au final, il n’était pas compliqué de comprendre qu’il avait fait un choix exécrables. Il était revenu dans sa vie alors qu’elle n’avait rien demandé, il lui a dit qu’il l’aimait alors qu’elle n’avait rien demandé, il l’a fait souffrir alors qu’elle n’avait rien demandé. Qui était-il pour se le permettre. Il n’était personne et pourtant il se prenait pour quelqu'un. Certains auraient dit qu’il jouait avec les sentiments de la jeune femme, mais c’est faux, il se trompait seulement sur les siens. Il se méprenait sur la qualité de ses propres sentiments. Il l’aimait et elle le savait, mais il ne voulait pas la faire souffrir, et c’est en ne voulant pas la faire souffrir qu’il l’a fait, comme tout le temps. À vouloir défaire le futur, il l’a créé. Aussi, lorsqu’il avait quitté la maison des Abbott, il avait fondu en larme, fait rare pour l’allemand, se rendant compte de ce qu’il avait fait. Il s’était réfugié chez lui et pendant une dizaine de jours, il avait bu comme jamais, il avait fumé comme jamais et il avait composé, pour oublier. C’était sa méthode quand il souffrait. Peut-être que s’il avait assumer son choix, il l’aurait mieux vécu, mais il ne l’avait pas fait et ça le rongeait.

Après un mois, il avait recommencé à vivre « normalement ». Il reprenait les concerts, il rejouait avec ses amis. Il lui arrivait même de faire des soirées. Même si la petite sœur de son meilleur ami était toujours dans son esprit, il avait d’une manière peu commune réussie à la mettre de côté, ou c’est ce qu’il croyait. Il avait même repris une activité qu’il avait laissé de côté pendant des années : le basketball. Ce sport qu’il chérissait et qu’il suivait à la TV car comme tout bon musicien, il n’était pas sportif. Pourtant, après être allé chez le médecin, celui-ci lui avait conseiller de se remettre au sport car avec son train de vie, il ne tiendrait pas longtemps. Il essayait de réduire la cigarette, mais c’était compliqué. Bref, il voulait faire de lui un autre homme, un homme qu’il n’était pas et ne serait probablement jamais. Il ne savait pas vivre sainement. Sa vie avait toujours tournée autours de la l’alcool, la cigarette et la fête. C’est la vie en tournée. C’est la vie d’un musicien aujourd’hui, la vie d’un musicien lambda.

C’était mi-juin et il faisait beau sur Los Angeles. Erik se dirigeait vers le terrain de basket, en voiture et il conduisait vite, très vite, trop vite. La vitesse l’enivrait et il aimait sentir le moteur de son Audi rugir. Il doublait à gauche comme à droite, il coupait les priorités et brulait les feux. Comme toujours. Il n’avait jamais eu d’accident, mais c’était sur le point de changer. Il arriva rapidement au terrain de basket et se gara. Le destin est parfois ironique car c’est une fois arrêté, le moteur éteint qu’une voiture lui rentra dedans. Sa tête percuta le volant et l’airbag s’ouvrit. Erik n’eu que le temps de sentir l’odeur de poudre qui accompagnait toujours l’explosion du airbag. Il essaya de relever la tête mais perdit connaissance. Il se réveilla dans une ambulance. Les ambulanciers le regardaient avec le sourire. Erik essaya de se relever mais il était fixé. Il ne sentait aucune douleur, à vrai dire il allait plutôt bien. Il leur demanda ce qu’il s’était passé, ils lui expliquèrent. Il avait perdu connaissance à plusieurs reprises mais jamais très longtemps. Chaque perte de connaissance entraînait une perte de mémoire à cours terme, rien de bien méchant. Ils lui dirent qu’il saignait un peu mais qu’à priori rien d’inquiétant ne lui était arrivé.

Ils arrivèrent à l’hôpital et il pu même sortir de l’ambulance en marchant, les ambulanciers le suivant avec un fauteuil roulant. Il se dirigea vers les urgences et pénétra dans l’enceinte de cet endroit bizarre et fabuleux en même temps. L’odeur de l’hôpital lui procurait une sensation particulière. Il n’aimait pas forcément cela mais il y avait quelque chose qui le faisait quand même sourire. Une infirmière le dirigea vers une chambre pour qu’un interne en neuro vienne l’ausculter. Il attendit environ une demi-heure. Il était patient donc ce n’était pas un problème, le saignement s’était arrêté et il ne ressentait rien. Il s’était couché pour patienter. Puis il entendit la porte de la chambre s’ouvrir et vit une belle rousse y rentrer. À se niveau, ce n’est plus de l’ironie, le Destin joue avec lui car l’interne qui venait de rentrer n’était autre que Lou-Ann. Là, ce n’était plus sa tête qui avait un problème, mais son cœur. Il se mit à battre à toute vitesse et l’allemand ressenti quelque vertige. Ce n’était pas le choc, plutôt ses émotions qui prenaient le dessus. Il observa Lou-Ann, il eu l’impression qu’elle hésitait à venir le soigner. Elle avait changé, elle n’était plus exactement le même, mais Erik n’arrivait pas à dire en quoi. Elle regarda le léger dossier que les ambulanciers lui avaient fourni et s’approcha de lui, sans un sourire, sans un mot. L’allemand baissa la tête, gêné. Un long silence s’installa, un silence qu’Erik fut le premier à briser : « J’ai eu un accident de voiture, j’ai eu plusieurs pertes de connaissance. Les ambulanciers ont dit que ce n’était pas méchant… » Il se prit les mains comme une protection devant lui. Il avait peur de sa réaction. Étrange, non ?