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 Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA

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MessageSujet: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyLun 23 Déc - 4:55


Jaime & Isla
don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass.


Je ne me souvenais pas combien de fois j’avais fait jouer l’album de Noël de Charlie Brown aujourd’hui. Peut-être 5, ou 6, ou 7? L’important était que je connaissais du bout des doigts le refrain de Linus & Lucy, que je le pianotais maintenant le plus naturellement du monde, l’esprit ailleurs, les yeux braqués sur mes cupcakes au four qui embaumaient la cuisine d’une délicate odeur de vanille. J’adorais Noël. Petite, Lavender s’était donné pour mission de créer une espèce d’anticipation dès les premiers jours de décembre. Comme la neige se faisait rare à Los Angeles en période « hivernale », il fallait donc user de ruses et de stratagèmes fins pour répandre la magie de Noël un peu partout où on le voulait bien. Dans mon cas, c’était la chasse au sapin parfait, puis les longs après-midis à cuisiner des biscuits au pain d’épices en quantité industrielle, mais aussi les week-ends à amasser jouets et vêtements pour les familles un peu plus démunies, et surtout la cérémonie quasi-ancêstrale de la dinde. Alors là, c’était tout un événement. Si je partageais la majorité des activités festives avec Lavie, c’était Rosa qui se chargeait du volet dinde de notre réveillon. Plus la volaille était obèse, plus ma tante adoptive devenait euphorique. Je me souvenais de l’entendre se réveiller à 3h le matin pour badigeonner amoureusement ce qui formerait notre repas du soir, avant de le filer au four avec un bouquet garni fait maison et sa meilleure farce. «Il faut l'aimer pour qu'elle nous le rende bien.» qu'elle disait.

Noël était donc pour moi une série de traditions, de souvenirs heureux. Et ce, même si à la table mes parents, mes vrais, ne s’y retrouvaient pas. On s’habitue à être orpheline, j’crois bien. C’est horrible de dire un truc du genre, mais c’est vrai. La mémoire s’adapte, elle comprend, elle se moule à ce qui nous arrive et qui nous fait du bien, et garde les autres souvenirs, ceux impliquant des gens perdus ou des succès brisés, dans un tiroir secret qui s’ouvre parfois, lorsqu’on pose la tête sur l’oreiller. Bref, mes tantes avaient toujours réussi à me faire aimer Noël. De toutes les fêtes, elle était probablement ma favorite, et rien qu’à entrer dans mon minuscule appartement on aurait pu clairement s’en rendre compte. Musique festive, odeur de menthe poivrée et de canneberge givrée, tonne de desserts prêts à être distribué… tiens. Ça me rappelait que ma bonne action tardait à rentrer chez elle. Un coup d’œil à la fenêtre donnant sur le stationnement du building où j’habitais me confirma que le voisin d’à-côté n’était toujours pas arrivé. Micro-soupir, avant de retourner à la cuisine m’affairer à la station des glaçages.

J’avais eu l’idée la veille, en passant au studio où j’enregistrais mes voix pour SuperSteve autour du monde, un cartoon rigolo pour enfant auquel je prêtais ma voix la plus cristalline sur la chaîne locale. J’avais dégoté ce boulot un peu n’importe comment à mon retour en ville et je prenais depuis un malin plaisir à enfiler une fausse cape et un masque imaginaire et à sauver veuve et orphelin à tous les coins du globe. Ironie du sort, avec mes jambes qui me démangeaient tant l’envie de sauter dans un avion de nouveau se faisait sentir, j’étanchais ma soif de voler loin, ailleurs, à grand coups d’épisodes de 12 minutes, diffusés les samedis matins. Bruits de pas dans les escaliers. Je sursaute, souriante, avant de me faufiler comme une gamine derrière l’œillet de ma porte d’entrée, curieuse de voir s’il s’agit de celui que j’attends. Yep, c’est bien ses cheveux ébouriffés que je reconnais rapidement. Suffit de monter un peu le volume de Fur Elise avant de filer mettre la touche finale à ma surprise sucrée. Parce que voyez-vous, en sortant du studio hier, j’étais tombée sur une conversation pas très cool, où le dit voisin, que je semblais croiser partout ces jours-ci, d’abord dans le building, puis à l’épicerie, puis au boulot… bref, lui, se faisait critiquer de tous les sens par ce qui semblait être son patron. À entendre entre les branches, il avait une « humeur de merde, agrémentée d’un choix musical d’outre-tombe qui avait un impact direct sur le moral des auditeurs. » Un truc du genre.

La solution selon moi? Un petit remontant sucré, livré directement à sa porte. Il avait de la chance, parce qu’habituellement je réservais mes desserts à Ash, ou à Deklan tiens, mais que mon esprit festif à outrance m’avait convaincu de cuisiner rien que pour lui, pour lui remonter un peu le moral. Les plus spirituels auraient parié que je le faisais pour mon karma, mais au plus profond, je savais qu’au final j’agissais de cette façon parce que mes tantes avaient été très claires depuis toujours avec moi : en période festive, le plus beau cadeau que l’on puisse faire était de penser aux gens qui nous entourent. Juste ça. & tout ça à la fois. Et comme il ne semblait pas avoir souvent de visiteurs, je me doutais qu’une douzaine de cupcakes accompagnés de mon plus grand sourire ne ferait pas de tort à son humeur, si merdique soit-elle. Je pris un petit recul pour constater la surprise finale : bon, j’avais peut-être été un peu trop généreuse niveau décorations rouges et vertes, mais l’intention était là, et les cupcakes aussi. J’éteins sagement le fourneau avant de lancer mon tablier au bout de mes bras et j’étais prête. Prête à faire juger de mes capacités d’apprentie-pâtissière, oh ouais parce que je vous ne l’avais pas dit, mais comme j’avais encore un peu de temps libre j’avais décidé de démarrer des cours dans une pâtisserie du coin, tiens. Mais surtout à faire plaisir. Du moins, c’était ce que j’espérais avec mes intentions les plus candides.

« Livraison spéciale! » m’exclamais-je, de l’autre côté de la porte du voisin, après avoir cogner trois p’tits coups discrets, une assiette remplie de gâteaux en main.

Oh!Darling


Dernière édition par Isla L. Hamilton le Mer 16 Juil - 1:56, édité 1 fois
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Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA Empty
MessageSujet: Re: Schtroumpf le hamster   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyVen 3 Jan - 4:12


lisa l. hamilton & a. jaime alworth
DON'T CRY OVER SPILLED MILK. WIPE IT UP AND POUR YOURSELF ANOTHER GLASS.


And now, it's time to leave and turn to dust.

« Tu repasses encore une seule fois ce truc et je retiens ta paye les six prochains mois pour compenser les frais de thérapie de tout l'étage. » Je lève les yeux le patron. Redresse ma tête. Mon échine. Amorce un mouvement pour m'étirer. Et me fige lorsque je vois Gary, mon ingénieur du son, grimacer derrière la vitre, là derrière. Langue sortie, yeux révulsés, il tranche sa carotide du tranchant de son pouce et s'effondre hors de ma vue, tombant de sa chaise. Je sens un pouffement de rire irradier dans mes joues, pourtant endolories par leur trop longue étreinte avec les paumes de mes mains, fatiguées, ennuyées. Et puis, je reporte mes iris opalines sur le patron et je ravale mon rire. Tempes froissées, grisonnantes, palpitantes. Il me regarde par-dessus ses lunettes, il me transperce par-dessus ses lunettes. L'épaisseur du verre est sujet à un nombre remarquable de vannes. Il y prend toujours part. Il en rajoute, blague sur sa vue aussi performante que celle d'un coquillage, flirte avec l'Oscar dans son imitation de Steve Urkel, raconte de bon coeur l'anecdote où, un jour, sa paire de loupes au bout du nez pendant ses vacances sous le soleil de la Sicile, il a mis le feu à ses mots croisés. Je n'ai jamais rien dit de méchant sur ses lunettes. J'ai rigolé, doucement, tout au plus. Mieux, je l'ai même complimenté sur sa nouvelle monture, à la fête de Thanksgiving, le mois dernier. Bon, d'accord, j'aurais peut-être pu faire attention au fait qu'il ne s'agissait que d'une fausse paire de binocles, le clignotement rythmée des petites leds lumineuses qui couraient autour des cercles et des branches auraient pu me mettre la puce à l'oreille. Mais je pensais bien faire ! et puis, back in London, je n'avais jamais célébré Thanksgiving. À Cumwhinton non plus. Ce n'est pas comme si on avait quelqu'un à remercier pour les moussons, nous, bons petits anglais qui avions fait le choix de rester au bercail plutôt que d'emboîter le pas au gênois Colomb. Je n'étais pas au clair avec les traditions locales. En matière de fêtes, en tout cas. Conduite à gauche, pourboires indispensables, jelly plutôt que jam et surtout, surtout, ne pas commander de thé. Sous aucun prétexte - juste, non. Tout ça, je maîtrisais. Comme un petit chef - quoique je soupçonne quelques frayeurs de la part des conducteurs sur la voie inverse, de temps à autre, mais bon, ça, ça ne date pas de mon arrivée aux Etats-Unis, je crois bien. Hors jeu.  

Mais leurs fêtes... J'avais frôlé la syncope, le jour du mariage princier. Drapé dans l'Union Jack, ma rousse écossaise fichée dans mes bras, à trépigner sur place à l'approche du carrosse, à commenter les chapeaux de la famille un par un, l'oeil affuté, à le laisser glisser ensuite sur les courbes de la belle-soeur, aussi innocent que le blanc de sa robe l'était. Et puis, les cloches sonnées, le baiser chastement échangé, un fond photobombé par la petite demoiselle d'honneur et son faciès un peu moins harmonieux que celui de notre future Reine, on était sortis de l'appartement, bras dessus, bras dessous, prêts à affronter les célébrations extérieures, à plonger dans la joie des autres, à les faire couler avec la nôtre. Et puis, on s'était rappelé qu'on était à Los Angeles. Et qu'un chewing gum collé entre l'étoile de Marilyn et celle de Ray aurait fait plus sensation que le mariage princier anglais. Largement. Alors, il ne fallait pas s'attendre à ce que je sois incollable sur leur Action de Grâce, ou leur 4 juillet ou leur Veterans Day. Pour moi, les coutumes se limitaient à ce que j'avais pu voir dans des films. À sacrifier des pauvres dindes, pour les enfiler sur sa tête, mettre un fez sur le dessus et remuer ses miches en rythme jusqu'à ce que sa moitié avoue enfin la vérité sur ses sentiments, avant de l'enfourner à 300° Fahrenheit - oui, ça sent le vécu, l'erreur et l'embrasement - pour ensuite s'en remplir la panse à craquer après avoir honoré le souvenir de ces pauvres expatriés, déracinés, tellement contents d'avoir finalement une ou deux céréales à se mettre sous la dent qu'ils avaient décrété cet instant jour de grâce. Point barre. Alors, non, il n'était pas évident que cette paire de lunettes trop grande, trop clinquante, trop illuminée n'était là que pour s'aligner à l'ambiance festive. Mais bon, ça les avait fait rire, je les avais rejoint timidement et j'étais parti quelque chose comme dix minutes après, la catastrophe Abby encore trop récente pour avoir le coeur à faire plus que jouer le fantôme pendant des lustres.

Enfin, c'est ce que j'avais cru. Parce que, là, alors qu'il me fusille du regard et que Gary n'est toujours pas réapparu derrière sa vitre d'ingénieur du son, c'est la seule explication plausible qui me vient à l'esprit pour justifier l'air mauvais qu'il m'offre. « M'sieur Galwick, je suis désolé pour ce que j'ai dit à la fête le mois dernier, je les trouvais vraiment chouette ces lunettes sur vous ! » Ma phrase part toute seule, sur un ton confondu que je ponctue du sourire le plus gentil que j'ai dans ma gamme. Il hausse un sourcil... Les fronce, plisse le nez, articule silencieusement un mais qu'est-ce que... ? Ah. Bah non. Ce n'était pas ça. Je reste la bouche entre ouverte, immobile, laissant juste mon regard naviguer ailleurs comme si j'espérais y trouver une autre raison à calquer à son air mécontent. Il doit saisir mon manque de compréhension - ou mettre ça sur le fait qu'il m'a surpris à deux doigts du sommeil ou juste sur celui que je suis bel et bien le crétin fini dont j'ai l'air, les cheveux en pétard et les yeux trop grands ouverts. « Que tu n'en foutes pas une rame pour l'animation, passe encore, ce n'est pas avec le nombre d'auditeurs qu'on a à cette heure-ci que ça va faire beaucoup de dégâts. Mais ta musique de dépressif, merde ! On va se retrouver avec un procès sur le dos, si tu continues ! » Je ne souligne pas le manque de cohésion dans ce qu'il vient de dire. Je ne le remarque même pas, pour tout avouer. Je me contente de secouer franchement la tête de bas en haut, mon air le plus confus peint sur les traits bien que mon regard se soit voilé, d'une façon qui ne laisse aucun doute quant à mon moral actuel. C'est vrai qu'avec tout ce qu'il se passait, à côté de mon boulot, je n'avais plus la frénésie qu'on me pensait pourtant indispensable. Le vague à l'âme, la fatigue qui se cumulait, les tourments de mes songes, tout cela n'avait rien de bien grisant et, bien que ce soit involontaire, j'avais bien conscience que mon rôle d'animateur en pâtissait. Dernier sourire tout sucre pour mon patron et le voilà qui tourne les talons, un brin plus détendu mais pas adouci pour autant, je retourne la tête en direction de la cabine, là-derrière, toujours sans voir de Gary - et je comprends que sa mimique de tout à l'heure n'avait rien de drôle ou de complice, il avait mimé sa propre mise à mort non pas par rapport à la venue du grand chef mais simplement parce qu'il en avait vraiment, vraiment envie. Mon regard dévie, atterrit sur l'écran de l'un des ordinateurs, celui que j'avais improvisé coussin d'une nuit, un peu plus tôt, plutôt que d'aller vérifier le site de l'émission, d'habitude si fourni. D'un glissement de doigt, je rafraîchis la page au petit oiseau bleu, en vain; pas même une Yoko73 qui réclame un morceau de Lennon ou un bernsteinRAW qui balance à quel point je lui casse les... pieds avec mes chroniques de... pacotille, alors qu'ils ne manquaient jamais un rendez-vous. Soupir étouffé, je décide de me remettre un peu d'aplomb et j'amorce un mouvement vers la souris de l'autre ordinateur. « Et n'essaye même pas d'enchaîner sur du Coldplay. » Coup d'oeil électrique vers le vieil ours qui a repassé sa tête par l'embrasure de la porte avant de la refermer derrière lui. Oh. Je reporte mon attention sur la playlist qui s'affiche devant moi, livide. Oh, oh.

▲▲▲
There's something in your eyes, don't hang your head in sorrow and please don't cry.
 
À défaut d'avoir osé laisser les chansons s'enchaîner tel que je l'avais décidé au moment où j'avais organisé la première partie de la nuit et les morceaux qui la rythmerait, peu désireux d'avoir à faire semblant d'être de bonne humeur ou, au contraire, craquer en pleine transmission comme cela avait déjà été le cas quelques fois, ces dernières semaines, j'avais glissé un titre ou deux à la suite, histoire qu'ils prennent le relais, après les derniers accords de l'orchestre jazzy et des doigts pianistes de Watson.

Et Galwick avait rappliqué moins de deux minutes plus tard.

Viré de ma propre émission. Momentanément. Sous d'autres termes. Etonnamment doucereux. Va te reposer, gamin, tu en as besoin. Mais viré quand même. La pilule était un peu dure à avaler. Mais sûrement pas autant qu'il le faudrait. Je me suis levé, sans rechigner, j'ai enfilé mon blouson de jean par-dessus mon t-shirt distendu avec un mal qui prouvait bien qu'il avait raison, j'ai refilé les commandes à Gary et j'ai enfoncé les mains dans les poches de mon pantalon noir en sortant du studio pour en ressortir une paire d'écouteurs et mon téléphone - j'avais déjà bien assez conscience que mon fier remplaçant d'un soir piocherait des musiques d'un genre qui ne me plairaient pas du tout, du tout, et s'aventurerait peut-être même à lâcher sa propre démo de rap. Je n'avais pas besoin d'entendre l'écho de ce carnage s'élever doucement dans les airs tandis que je parcourrais les couloirs du bâtiment qui me mèneraient au parking, ni même de risquer de tomber sur ma station en enclenchant l'autoradio, une fois assis derrière le volant. Alors, j'ai enfoncé mes écouteurs dans mes oreilles et j'ai pioché cette même chanson qui m'avait valu cette mise au repos forcé parmi les titres défilant sur mon téléphone. Et j'ai filé, bercé par le timbre d'Axl Rose, songeant que j'arriverais sûrement à la maison avant que le jour se soit proprement levé, même si je devine déjà quelques rayons, çà et là.

La bonne affaire, c'est que quand je pousse finalement la porte de l'appartement, il est quinze heures passées - nous ferons l'impasse sur ces quelques heures de battement (ou alors, très rapidement, pneu, canard, soleil, smoothie, graines de lin, allumettes, hôpital, Ben & Jerry's et  touristes chinois). Là.

Mieux vaut tard que jamais, vous me direz; c'est vrai, oui, mais je n'aurais pas dit non à un peu de repos. Je n'ai jamais contredit mon patron. J'ai besoin de me reposer. De refermer la porte derrière moi, de jeter mes clés dans la corbeille en osier orange et kaki qu'Abby m'a tissé pour mon anniversaire spécialement pour que je ne perde plus mes clés et qu'on ne retrouve pas un sombre inconnu au milieu de notre salon en rentrant d'une soirée à quatre heures du matin, de filer droit vers ma chambre, de me laisser tomber sur mon lit - et préférablement viser juste, histoire de ne pas finir sur le tapis - et d'enfoncer ma tête dans un coussin, un vrai de vrai, et ne plus en bouger pour la poignée d'heures qui suivront. Mais j'atteins à peine la troisième base (au moins un domaine où j'arrive à dépasser la première, tiens) quand j'entends quelqu'un qui frappe à la porte d'entrée. Stoppé dans mon élan, alors que j'usais déjà de mes dernières forces pour calculer la juste trajectoire pour m'étaler sur mon lit sans même prendre la peine d'enlever mon blouson, mes chaussures ou même mon pantalon - bon, j'avoue que si je l'avais fait, avec ce dernier, ça n'aurait pas eu trop de sens, mais, hé, j'suis Jaime. Une moue s'éprend de mes traits, mais je n'hésite pas une seconde avant de rebrousser chemin, la patte certes un peu traînante, mais le sourire qui se forme sur mes lèvres lorsque j'ouvre la porte n'en est pas moins franc et poli. « Oh, des gâteaux... Je vais chercher de l'argent, reste-là. » Et je referme la porte. Pas certain d'avoir vu qui que ce soit, mais j'ai senti le biscuit, ça, j'en suis sûr, sûr et certain, alors je pense que ça compense mon manque d'attention due à une action mécanique due à un manque de fatigue certain du à un moral au fond des chaussettes. En parlant de chaussettes - je fourre ma main dans l'une des deux qui sont accrochées au mur, rares éléments de la maigre décoration que j'avais trouvé le coeur à mettre à l'appartement et, qui plus est, reconvertis en fourre-tout, à défaut d'avoir une colocataire pour se la jouer Père Noël le soir du réveillon dans le coin. J'en ressors les quelques billets que je me souvenais avoir fiché là, l'autre soir, quand le livreur de pizza m'avait rendu une tonne et demi de petites coupures - faut dire que je ne m'étais toujours pas acclimaté au dollar non plus, entre vous et moi - et laisse mon regard scruter les décorations de la chaussette un peu plus que de raison, laissant mes songes se perdre un peu plus loin, un peu trop loin. Je me souviens des Noëls passés, de mon amour presque pathologique pour cette période de l'année, de l'excitation partagée avec Abby depuis que nous vivions ensemble au moment de la décoration du sapin, celle des fenêtres, les guirlandes lumineuses qu'on suspendait partout, les couvertures trop grandes et trop épaisses qu'on glissait ça et là, les pots en forme de bonshommes et de rennes qu'on remplissait de caramels, de biscuits à l'anis, de Jammie Dodgers et de chocolat et, surtout, surtout !, des boules à neige qu'on disposait partout, quitte à en faire plier les étagères. Et là, il n'y avait rien. Deux misérables chaussettes, plantées pour me faire bonne conscience, un mini sapin en plastique, là-bas, et les boules posées dans leur boîte, juste à côté. Et surtout, il n'y avait rien - pas de vie. Pas de Miracle on 34th Street qui tournait en boucle, parfois dans le vide, parfois sous nos yeux brillants. Il n'y avait pas d'Abby.


Je sers mes doigts sur les quelques billets que j'ai trouvés, les frotte les uns contre les autres et m'efforce d'oublier cet instant, luttant pour garder un sourire correct au bout des lèvres lorsque je rejoins la porte d'entrée. Je deviens plutôt bon à ce petit jeu-là, celui de tout planquer dans un coin de ma tête et faire comme si de rien n'était. Ou alors, je suis peut-être juste un peu trop à l'ouest pour ne pas vraiment oublier ce qui vient de me passer par la tête. Bras tendu, billets au vent, je rouvre la battante et reporte d'instinct mon regard sur les cupcakes - ah, oui, c'est ça que j'ai vu, la fois d'avant, et rien de plus. Et puis, mon regard finit par lever vers l'humain qui tient le plateau, grand sourire aux lèvres, près à proposer tout ce que j'ai en  main contre tout ce qu'elle a en main... Mais je me fais couper en plein vol. Je fronce les sourcils, brusquement, et puis  c'est mon visage tout entier qui suit le mouvement.  « Hey, mais tu n'es pas une petite scout ! » Ca résonne comme un reproche. Cuisant. C'en est un, jusqu'à ce que je m'entende, que j'analyse les traits de ce visage pourtant omniprésent, partout, tout le temps, depuis quelques semaines et que je me rende compte que je ne dois pas avoir l'air bien malin, mon argent brandi juste sous son nez. Mon air se défait, je perds quelques teintes en une seconde ou deux et puis je souris à nouveau, bien moins jovial, bien plus embarrassé. « Enfin j'veux dire, je... Pardon, j'ai cru que c'était pour vendre des... et comme c'est Noël, c'est... » Shut up, you bloody fooley face, j'entends la voix de la rousse résonner en écho à la mienne qui panique et, pour une fois, ce sera salutaire. Je pince mes lèvres, comme pour m'empêcher d'en dire plus. Je recule ma main verte, sans savoir quoi en faire pour autant - ça serait quand même pas vachement malpoli de lui siffler quelques dollars juste parce qu'elle n'arbore pas l'écharpe des scouts et trois pins de mérite ? -, alors, l'autre, mécanique, impulsive, solidaire, elle compense en se précipitant dans le tas de cupcakes pour en saisir un. « Oooh... Des gâteauux... » Well, reboot. Ce n'est peut-être pas plus mal. Enfin, au point où j'en suis, je doute que quoi que ce puisse être plus mal. J'ai toutefois la décence d'esprit de ne pas l'enfourner tout de suite dans ma bouche, préférant vérifier mon droit de cuissage (mis au niveau Jaime 1.0) sur le délicieux glaçage que j'observe de plus près sur la pâtisserie - résolution de l'année, ne pas dévorer tout ce qu'il me passe sous le nez sans en avoir la permission. « C'est pour moi ? » La question sonne déjà un peu con, avec le sourire que j'y mets et les yeux innocents assortis, mais j'atteins le summum une seconde plus tard, en enfournant la bonne moitié du cupcake dans ma bouche, avant même qu'elle ait eu le temps de me répondre; mon regard s'est déporté sur la droite, légèrement, et j'ai vu la porte de la concierge s'ouvrir... Et je me retrouve déjà hors de l'appartement, pour me glisser derrière la jeune brune et, justement, la faire rentrer mon appartement, en moins de temps qu'il en faut pour le dire. Jongler avec une scout qui n'en est pas une, je veux bien. Jongler avec la vieille bique, ses ragots et ses envies de croustillants concernant ma colocataire et son suicide raté, non merci. La porte refermée, je jette un regard un brin parano par l'oeillet, me souviens qu'il est cassé, enfourne l'autre moitié du cupcake dans ma bouche par dépit... et me retourne vers la voisine, inconnue mais pas trop, qui n'a probablement pas su suivre le rythme. Je m'immobilise, un court instant, reprend une mastication, puis deux, prudent, mon regard rivé sur elle... Et puis, je lève un pouce vers elle et secoue doucement mon autre main, mes yeux grands ouverts. « La 'ache, ch'est chuper bon ! » Hey, salut, je ne crois pas qu'on se soit déjà présenté, je m'appelle Jaime, je n'ai pas dormi depuis plus de 24 heures et je viens de t'enfermer dans mon appartement sans que tu aies eu le temps d'aligner deux battements de coeur. Nice to meet you!


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Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA Empty
MessageSujet: Re: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyJeu 23 Jan - 5:45


Jaime & Isla
don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass.


Je ne pu faire autrement que d’éclater de rire lorsque mon voisin passa de l’étonnement à un claquement de porte bien entendu. « Oh, des gâteaux... Je vais chercher de l'argent, reste-là. » Je riais, d’abord parce que malgré les quelques bribes qu’on avait échangées depuis qu’on habitait sur le même pallier ou alors qu’on se croisait à tous les coins de rue, n’en était que son énergie débridée m’amusait. J’aimais les gens vrais, les gens passionnés, les gens un peu dérangés. Surement qu’à la longue, à force de me raccrocher aux cas qui m’apparaissaient hors de l’ordinaire me mènerait à ma perte. Mais pour l’instant, ils me fascinaient. Il me fascinait. Je l’entendais farfouiller à l’intérieur de son appart, probablement à la recherche des dits dollars qu’il avait mentionnés et que je m’empresserais de refuser. Le sourire aux lèvres, j’eus un souvenir de mes premiers jours ici, de retour à L.A. De cet immeuble que je n’avais jamais vraiment remarqué, habituée aux quartiers banlieusards en bordure de Santa Monica où j’avais été élevée par mes tantes. Venice, par contre, n’avait jamais été vraiment attirant à mon époque, alors qu’il s’agissait d’un endroit paumé pur et dur. Avec le temps, on avait embelli le coin et des dizaines de gens hips et bien fameux y étaient débarqué, clamant qu’il s’agissait là d’un nouveau quartier tendance à revamper et à recommencer à aimer. Et j’avais craqué. Par le clash de ces hipsters peu assumés qui y avaient bâti leur réseau, par les gens moins bien fortunés qui y rôdaient toujours, affamés certes, mais curieux de voir ce que cette partie de la ville finirait par leur offrir, un jour. Cet appart, j’étais tombée dessus par le plus pur des hasards, cherchant à éviter de passer un trop long après-midi à fouiner dans la ville, assise à l’arrière d’un taxi qui empestait, beaucoup trop honteuse de demander l’aide de qui que ce soit pour mes recherches. Après avoir filé à l’anglaise, je leur devais bien ça à mes amis d’avant, ceux que j’avais lamentablement laissé de côté. Le respect de ne pas les harceler et de me débrouiller seule, bref.

Seule. Moi qui avait toujours été entourée partout où que j’aille, je me retrouvais à quelques jours de Noël en mode solitaire. Ash était prise au boulot, et il était hors de question que je fasse signe à Deklan vu ce qui s’était passé entre nous quelques jours plus tôt. J’avais besoin de décrocher, j’avais besoin d’une nouvelle vie sociale, j’avais besoin d’un temps de pause, de vacances, de même quelques minutes s’il fallait juste pour faire le vide. Tiens, c’était bien ça. Faire le vide… ou même faire le plein. Et le voisin ouvra de nouveau sa porte, à la volée. De tous ceux qui habitaient ici, il était celui qui me semblait le plus sympathique. Le plus éparpillé oui, mais le plus authentique. Je l’aimais déjà, même si je ne lui avais accordé que deux trois mots au détour d’un des mille endroits où on se croisait, à tous les jours. À force de vivre au presque-même endroit, de faire notre épicerie aux mêmes moments et de bosser dans le même building, y’avait une drôle de chimie qui s’était bâtie de mon côté, du sien je l’ignorais, et je ne pouvais faire autrement que de sourire lorsque je voyais sa petite tête brune s’agiter dans tous les sens, au loin. J’aurais presque pu le reconnaître parmi la foule, si je me trouvais dans un de nos endroits favoris. Mis à part ma blonde galloise et son frère, il était l’un des visages les plus familiers que je connaissais, ici. Ce sont les mains du voisin qui finissèrent par me distraire, me filant les billets sous les yeux alors que je voyais déjà ses doigts se tendre vers l’assiette de desserts que je brandissais fièrement. Il était de retour et affamé comme personne et malgré mes protestations, il semblait ignorer le fait que je ne veuille pas de son argent. « Hey, mais tu n'es pas une petite scout ! » J’éclatai de nouveau, secouant gentiment la tête. Non m’sieur, vous vous êtes trompé de personne. « Oh, non! Mais je peux comprendre qu’avec la déco qu’ont mes cupcakes, je pourrai facilement passer pour une enfant. » que je rigolai, constatant que mes gâteaux avaient pris chaud à force d’attendre sur le pas de la porte d’être dévorés.

Sourire entendu, je fis un pas dans sa direction, l’encourageant à plonger avant qu’il ne soit trop tard et que mes petites surprises sucrées aient commencé à fossiliser. Mon regard filait entre lui et l’assiette, mais s’accrocha vite fait à l’intérieur de son appartement, visiblement tout sauf prêt à accueillir Noël. Un maigre sapin, quelques boules colorées et une guirlande de lumières pendouillante me filèrent un p’tit coup de panique. Et s’il était un genre de Grinch moderne? Et s’il était juif? Et si j’étais la seule personne censée, à l’aube de la trentaine, qui devenait aussi gaga qu’une petite fille à Noël? Pour ajouter à ma panique intérieure, je remarquai qu’on entendait au loin mon CD de Charlie Brown qui résonnait dans les couloirs. Ouais, j’en avais peut-être un peu trop fait… « Désolée hen, pour l’abus de musique de Noël. Dès le 1er décembre, je me métamorphose en lutin. » Je fis mine de rigoler, mais réalisant qu’il ne m’accordait presque aucune attention versus les yeux qu’il offrait à mes gâteaux, j’en conclu que j’étais pardonnée. « Oooh... Des gâteauux... C'est pour moi ? » Je lui tendis donc de plus belle l’assiette, hochant positivement de la tête, me réjouissant que mon maigre acte de générosité entre voisins lui remonterait limite le moral depuis la conversation abrasive que j’avais surprise à son bureau. À la voir se donner corps et âme pour manger le tout, il s’empiffrait en champion!, je cru bon de le laisser aller, incapable de lutter contre sa faim. C’est lorsque je le vis écarquiller des yeux que je fronçai les sourcils, de peur qu’il ait trouvé un cheveux ou un truc du genre, mais il m’agrippa rapidement et m’attira chez lui, fermant la porte avec fougue. Bon. D’abord j’avais l’habitude de débarquer un peu n’importe où n’importe comment, mais tout de même, j’étais curieuse de savoir ce qui l’avait fait réagir de la sorte, autre qu’il voulait peut-être me séquestrer pour me forcer à lui cuisiner des desserts jusqu’à ce qu’il explose. « Ça… ça va? » Que je demandai, intriguée, le voyant guetter l’œillet férocement, la bouche recouverte de glaçage à gâteau. « La 'ache, ch'est chuper bon ! »

Et j’entendis toussoter, dans le couloir. Ma mémoire d’éléphant s’enclencha et je reconnu tout de suite la toux singulière de la concierge du building, celle-là même qui récupérait les chèques à chaque mois. Celle-là même qui était déjà passé 3 fois chez moi depuis plusieurs jours, anticipant que j’allais encore une fois avoir du retard sur le paiement. L’instinct de guerrière que j’avais, ou juste la frousse de passer encore pour la pauvre fille de service, me fit réagir vite, et je m’accroupis derrière la porte du voisin, persuadée que ma ruse me cacherait assez longtemps d’elle pour que son sixième sens ne réalise pas que j’étais bien là, à quelques centimètres, le compte en banque à sec et la tête pleine de promesses. « Merci pour les réflexes! J’avais aucune idée pour justifier le retard de paiement de ce mois-ci. » que je lui confiai à voix basse, le plus naturellement du monde. J’aurais pu me retenir, au passage, parce que qui sait peut-être qu’il était intimement lié à elle et qu’il irait tout lui bavasser dès la première occasion, lui donnant l’arme parfaite pour m’expulser vite fait de chez moi, mais j’sais pas, il dégageait quelque chose qui me mettait en confiance. Comme un grand gamin, comme un préadolescent un peu perdu mais terriblement attachant qui n’avait pas une once de malice entre les deux oreilles. J’ignorais si c’était son air toujours un peu détaché ou son grand sourire niais, mais je me sentais tout sauf en danger de lui dévoiler l’état lamentable de mes finances, s’il avait à demander. En fait, si j’avais pu squatter un coussin sur son divan pour tout l’après-midi je l’aurais bien fait, histoire de laisser mes tracas de côté et de jouer à la bonne voisine pendant quelques heures. Mais c’était pas mon genre de m’imposer. Et au passage, ce n’était pas non plus mon genre de laisser aller une assiette de pâtisseries sans au moins en prendre quelques bouchées.

« Je peux? » ma voix se faisait amusée, alors que je me redressais du sol et que je pointais l’assiette de cupcakes qu’il tenait maintenant. « J’ai même pas eu le temps de goûter! »

Oh!Darling


Dernière édition par Isla L. Hamilton le Mer 16 Juil - 1:57, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyLun 10 Fév - 21:40


lisa l. hamilton & a. jaime alworth
DON'T CRY OVER SPILLED MILK. WIPE IT UP AND POUR YOURSELF ANOTHER GLASS.


La socialisation en trois étapes, par Aaron James Alworth.


Étape une, prenez trop de centimètres entre vos quinze et seize ans et ne laissez surtout pas le reste de votre corps suivre l'initiative de vos os. Gardez les mêmes muscles, déjà pauvres, étirez-les un peu plus, jusqu'à obtenir le résultat souhaité et abordez ensuite fièrement votre morphologie de spaghetti rachitique le plus loin possible de la moindre salle de gymnastique. Gardez également vos distances de toute vitrine de prêt-à-porter abordant les mots "trendy", "fashion", "street" ou "chic", ainsi que de celles de salons de coiffure et même de toiletteurs pour chiens ambulants ; ces zones à risque sont susceptibles de vous donner une apparence normale.

Étape deux, désactivez l'option "Conscience de soi" de votre bios cérébral et retirez par la même occasion la barrette intitulée "Réflexion pré-prise de parole". Vous pouvez, au choix, la remplacer par la "Piquage de fards et bafouillements post-prise de parole ratée" ou la laisser l'emplacement vide.  N'ayez pas peur d'y aller franchement et ne vous ennuyez pas à dépoussiérer la zone; un à-coup ou deux et une pellicule de particules qui parasiteront les connexions vous donneront l'occasion d'expérimenter  quelques bugs ça et là, vous plongeant totalement dans l'effet recherché.

Étape trois, stoppez votre maturité à l'âge approximatif de dix ans. Vous aurez besoin ici d'un élément supplémentaire auquel vous raccrochez; préférez-le d'une teinte lumineuse, idéalement rousse, bien qu'il ait été récemment conseillé de prendre garde quant aux réactions parfois imprévisibles de celui-ci lorsque laissé sans surveillance. Déléguez à cet élément toutes les tâches découlant de votre passage officiel à l'âge adulte ; ainsi, lorsque l'élément s'avérera momentanément défectueux et sera envoyé en réparation et qu'une de ces tâches précédemment évoquées reviendra au premier plan sans attendre, vous aurez tout le loisir de vous mettre à paniquer en bonne et due forme.



« Le retard du paiement de ce mois-ci... ? » Je reprends la fin de sa réplique, mot pour mot, de prime abord avec un sourire crémeux et chocolaté qui ne résistera pourtant pas bien longtemps. Les paiements ? Paiement. Ce mot résonne à mes oreilles, surprenant. Connu et pourtant si étranger. Usuel, lascif, mordant. Je cligne des yeux, une fois, encore une, laisse mon regard se perdre dans le vite, bien calme en comparaison à la cadence soutenue sous laquelle mes neurones s'affairent à rétablir leurs pauvres circuits. Et là, là, je revois la rousse. La rousse qui me conduit dans ma chambre, m'arrache les quelques feuilles que j'ai dans les mains et les remplace par un bouquin énorme sur lequel elle superpose son walkman presque aussi vieux que nous, puis, je l'entends tout juste me donner l'ordre de rester sagement là-dedans le temps qu'elle ait fini les paiements avant qu'elle n'enfonce son casque sur mes oreilles et qu'elle me ferme la porte au nez, toujours avec cet air affolé que j'ai vu se peindre sur ses traits tandis que je m'étais mis à farfouiller curieusement parmi les tas de papier qu'elle avait fait sur la table du salon et qu'elle protégeait bec et ongles,  à peine avait-elle eu le dos tourné.  Et puis, je reviens sur Terre, sur la brune qui rigole encore adossée à la porte, dans l'appartement décoré au fusil que je balaie de mes prunelles électrifiées jusqu'à ce qu'elles s'accrochent au tas de lettres qui gisent sur le plan de travail, là à-côté, et que j'ai été trop occupé à nourrir les chats, peigner les franges du tapis et me morfondre devant des films de Noël au goût bien différent que les précédentes années pour ouvrir depuis... Depuis pas mal de temps. Ni une, ni deux, je me retrouve collé à la porte à mon tour, manquant certainement de l'assommer d'un coup de genou - boh, au point où j'en suis, ça n'aurait été qu'un détail parmi tant d'autres - et colle mon oeil au judas de la battante, le souffle court, coincé dans mes poumons comme si je guettais Jack l'Eventreur. « Damn, c'est quand qu'il faut payer ces trucs ? » Comme si cela allait me servir ; je me retrouverais bien loti, avec une date limite que je devine largement dépassée, sans savoir pour autant quoi en faire. Ma voix est tremblotante mais je doute qu'elle puisse s'en rendre compte, mon ton est trop bas et trop méfiant pour ça, toujours le visage flanqué contre le bois miteux de la porte que j'entends d'ailleurs craquer un instant plus tard. Pas téméraire, je recule un peu, m'imaginant déjà m'étaler de tout mon long, brisant le bois de la porte et la nuque de la concierge dans la foulée - ça non plus, ça ne m'étonnerait même pas. Je jette un ultime regard à travers l'oeillet sur un couloir qui paraît vide, puis m'en détourne, finalement, l'air hésitant et un brin inquiet. Déjà que je faisais des pieds et des mains pour éviter la concierge et ses questions concernant Abby qui ne pouvaient que me renvoyer au fait que, non, je n'en sais fichtrement rien de plus qu'elle et que je m'étalais dans les escaliers un jour sur deux, emmitouflé dans la psychose qu'elle pourrait débarquer au bout du couloir à chaque fois que j'entends une poignée de porte se tourner, peu importe l'étage où je me trouve - j'ai même senti mon palpitant s'accélérer la semaine dernière, alors que je me faisais un café au studio et que j'ai vu apparaître l'ombre d'une serpillère sur le mur d'en face, c'est pour dire -, j'avais maintenant une nouvelle raison de la redouter. Raison que je puise dans l'air complice qu'aborde mon invitée séquest... surprise, sans aucun doute humoristique - et que je ne perçois pourtant que comme inquiet, anxieux, terrifié. Je m'imagine déjà les gros bras à qui elle a peut-être déjà eu affaire, deux molosses tatoués et partiellement dentés, guidés au doigt et à l'oeil par la vieille qui, derrière ses airs de commère aussi intrusive que seule et inoffensive, devait sûrement cacher son jeu, j'en suis désormais convaincu. Déjà que cette hypothèse avait été évoquée, il y a des mois de cela, pendant que ma colocataire et moi débattions quant à ce que donnerait le film d'horreur à peine terminé dans la vie réelle - est-il nécessaire de préciser que j'avais été obligé d'enchaîner sur deux comédies et une saison entière d'un sitcom pour me défaire de ma tachycardie, après avoir appris que la concierge était une sociopathe sanguinaire, que deux de mes voisins servaient avec ferveur la secte de tordus du coin et que le vendeur de nems de l'angle avait le hachoir facile ?

Mais je ne me perds pas plus loin. Elle s'est relevée, elle a l'air parfaitement normale et saine d'esprit et elle me réclame un cupcake. Et si ce dernier point pourrait être sujet à débat entre mon estomac qui hurle qu'on lui arrache les yeux et qu'on la pousse dans un volcan à la Gollum et le peu de conventions sociales qui traînent ça et là du côté de ma tête, c'est finalement mon hospitalité maladive qui revient au front, rappelée par le sourire qu'elle m'adresse et son air détendu qui m'apaise. Alors, tout sourire à mon tour, à nouveau, j'oublie le mauvais film sicilien dont j'écrivais déjà le scénario, la guest star en la personne de la concierge et mes dettes d'au moins deux milliards de dollars et je me précipite vers elle, à nouveau, sûrement trop proche, comme toujours, et lui tends le plat avec tout l'entrain du monde. J'attends logiquement d'avoir enfourné la deuxième moitié du mien, laissé en plan entre mes doigts, avant de reprendre la parole, bouche pleine. « Bien sûr ! 'scuse-moi, quand il est question de sucre, je... Enfin, voilà. » Je lève les yeux au ciel en levant une main vers mon visage, agitant ma spaghettissitude dans tous les sens l'espace de quelques secondes, histoire qu'elle comprenne le sous-entendu qui se veut humoristique. Ouais, le sucre. Il a bon dos le sucre. « D'ailleurs, j'crois même pas qu'on se soit déjà vraiment présentés. Je m'appelle- I'M STIIILL STAAANDING AFTER ALL THIS TIME, PICKING UP...» Je sursaute, franchement. Me demande, un instant, par quelle sorcellerie Elton John vient juste de prendre la parole à ma place. Reste de marbre, terrorisé par les idées qui me traversent l'esprit, les ingrédients qu'elle aurait pu ajouter à sa mixture. Et puis, je fais le lien avec ma main, qui vient d'aller poser le plateau sur le comptoir, juste à côté de nous, sur un journal froissé et la télécommande qui se cache juste en dessous. Virant au rouge en moins de deux, je m'empresse de reprendre le plat et de le lui remettre entre les mains, pour ensuite repousser le journal qui va s'écraser par terre - entraînant avec lui le maigre sapin qui décorait la moindre les lieux et dont je ne parviens à retenir qu'une guirlande, du bout des doigts - et finalement attraper la télécommande de la chaîne Hifi qui s'est enclenchée, à l'autre bout de la pièce, à fond les manettes. J'appuie sur un bouton, sur un autre, sur tous - je crois avoir réussir mon coup quand je me rends compte que je n'ai que viré sur Benny and the Jets, un peu plus calme, pas moins fort pour autant. Ma guirlande dans la main et la stupide télécommande dans l'autre, je me précipite à travers le salon et brave le son décapant jusqu'à atteindre la chaîne, que je finis par faire taire, le gros bouton rouge suffisamment explicite, cette fois-ci pour ma petite tête. Petite tête que je retourne vers la voisine, d'abord trop lentement puis bien trop vite pour paraître un tant soit peu contenue; sourire maladroit aux lèvres et regard humide tant j'ai envie d'avoir un peu de chance, rien qu'une fois dans ma vie, je formule la première chose qui me passe par l'esprit et qui sauverait, rien qu'un peu, les apparences. « Hm, tu auras constaté que... Il n'y a pas de souci niveau musique de Noël... »  Ah ? Le vent tournerait-il en ma faveur ? Je n'ai presque pas balbutié et ma réplique aurait presque du sens, reprenant la remarque qu'elle m'a fait plus tôt et que je semblais n'avoir pas même relevé. C'est donc presque fier de moi que j'enchaîne aussitôt, histoire d'effacer cet épisode de son esprit avant même qu'il ait eu le temps de s'y inscrire, tiens. « Donc, je disais; je m'appelle Elton. » ... Ah. Un peu plus pivoine, les pommettes, s'il vous plaît. Fuck it. Cette fois-ci, par contre, je ne me laisse même plus ressasser ce que je viens de dire. Comme blasé. Exténué. Je me contente d'écouter l'écho de ma voix s'élever alors que je me suis rendu compte une fraction de seconde plus tôt de ma bourde. Je regarde les lettres de mon nouveau prénom s'envoler dans les airs, s'aligner à hauteur de mes yeux, se mettre à bouger au rythme de I'm still standing avant de se dissiper et laisser réapparaître la brune qu'elles cachaient derrière elle. Je souris, l'air de rien, au bout du rouleau, et j'enroule sans même m'en rendre compte la guirlande dorée autour de mon cou, telle une écharpe - sûrement un coup de ma conscience qui se dit que, tant qu'à changer de personnage, autant le faire jusqu'au bout, hé.  Mon autre main envoie valser la télécommande sur le canapé, je suis sa trajectoire d'un regard mou et d'un sourire presque triste. Et puis, je reviens sur elle. Lâche un petit soupir. Et me réveille, brusquement, lorsque je la vois amorcer un mouvement pour prendre la parole. « Tu veux boire quelque chose avec ton cupcake ? » En moins de deux, j'ai débité ça à toute allure, filé dans la cuisine et déjà plongé dans le placard pour en sortir deux mugs avec l'adorable petit George sur l'un et le moins adorable Prince Philippe sur l'autre - hé, on est dans le QG du roastbeefisme, l'oubliez pas -  puis dans le frigo. « J'peux te proposer du thé, du café ou du jus de... de... » Tiens, bonne question. Je me redresse, suspicieux au possible, mes traits lassés l'instant plutôt désormais froissé dans une mimique sans égale. Je tente de décrypter l'étiquette, cherche à savoir par quelle magie ce truc a pu atterrir là-dedans. On aurait presque dit... Ah, oui, un smoothie maison d'Abby. La même Abby qui n'a plus mis le pied ici depuis trois mois. Je repose trop vite la bouteille à sa place dans le frigo - quoique sa place se situe plutôt à la poubelle, voire à l'autre bout du pays, si je me base sur les morceaux que j'entends distinctement cogner contre le verre du contenant. Une grimace terrifiée aux traits, je me dépêche de refermer la porte du frigidaire et de relever les yeux vers la brunette. « ... de thé. Du jus de thé. Qu'est-ce qui te tente ? »

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MessageSujet: Re: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyVen 21 Fév - 5:29


Jaime & Isla
don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass.


Il pouvait fixer le vide comme partir en vrille, et ça m’amusait. Quelqu’un qui avait l’air d’être encore plus une pile électrique que moi-même me plaisait. Ça me donnait un répit, ou une bonne dose d’énergie. Un grand sourire, au moins. Et c’était pour le mieux, je pouvais vous le confirmer. « Le retard du paiement de ce mois-ci... ? » J’hochai la tête, parce que c’était ce que les gens avisé faisaient. Ils étaient au courant du montant à payer, de la date où le faire, de l’état de leurs cartes de crédit, du montant au sous près qui trônait fièrement dans leur compte en banque blindé pour la retraite. J’avais l’air de me la couler douce parce que j’avais mentionné le tout façon relax, presque zen d’être sans un rond pour assurer le toit au-dessus de ma tête depuis belle lurette. Mais de voir qu’il réagissait autant vite, sinon mieux que moi à la proprio de l’immeuble me fit un petit velours. Presque trente ans et complètement ruinée : ça n’effrayait pas les voisins autant que j’aurais pu le croire. Bon à savoir. « Damn, c'est quand qu'il faut payer ces trucs ? » « Si je savais, je serais pas accroupie au sol, crois-moi! » que je rigole, incapable de justifier à quel moment j'avais pris la décision de rester une adolescente parmi les 1001 tâches que la vie avait décidé de me filer entre les doigts. C’était peut-être lorsque j’avais abandonné l’université, prétextant que j’avais envie d’apprendre de moi-même plutôt que la tête dans des briques que je ne comprenais pas. Ou alors lorsque j’avais acheté mon premier billet d'avion vers le Brésil avec le reste d’économies que mes tantes avaient mis de côté pour m’aider à rembourser un prêt pris pour une voiture qui m’avait éclatée devant les yeux 6 mois après l’achat. Ou alors lorsque j’avais marié un type au Népal sous prétexte qu’il m’avait fait goûter les meilleurs biscuits de l’univers… et que j’avais passé la semaine suivante avec Colton à tenter de trouver un moyen de divorcer avant de me rendre compte que le moine qui nous avait marié en premier lieu était en fait un surfeur stone déguisé pour l’occasion. M’enfin bref, vous comprenez le topo. Je n’étais pas particulièrement mature, et mon interlocuteur semblait partager la même situation que moi, si ce n’est le faux-mariage. Au moins.

Quelques minutes plus tard et je me relevais, prête à reprendre le cours normal de ma vie. Comme je l’avais fait tant de fois déjà, depuis que j’étais emménagée dans l’immeuble. L’appart me plaisait, le quartier tout autant, si ce n’est que le prix exorbitant me faisait mal au portefeuille. J’avais de la difficulté à garder ne serait-ce que quelques billets de côté une fois un article rédigé, et j’étais beaucoup trop éparpillée pour oser demander à Ashleigh de m’héberger chez elle comme humble coloc. J’aurais beaucoup trop peur que mes conneries me coûtent son amitié, même si elle me connaissait depuis presque toujours et qu’elle m’avait vue dans toutes les situations du monde. J’oserais pas. Je préférais rester dans mes trucs, empiler mes dettes, et rêver qu’un jour un prince charmant débarque avec ses lingots d’or et règle la note. Ou qu’il m’invite officiellement à habiter avec lui dans son palais de marbre blanc, au bord de l’océan. L’un ou l’autre me conviendrait, assurément. L’esprit voguant autour de ma future vie de princesse riche et célèbre, j’osai pousser la chance aussi loin que de demander à mon voisin s’il m’autorisait à goûter l’un de mes gâteaux. Parce que ouais, j’étais bien heureuse de voir qu’ils lui faisaient plaisir, mais à force de les faire valser sous mon nez c’était difficile de résister à ce qu’une dose de sucre pouvait avoir comme effet. En vrai gentleman, il me tendit l’assiette, se présentant au passage. J’allais ouvrir l’oreille, parce que depuis le temps que je le croisais j’ignorais tout de lui jusqu’à même son nom, avant que la chaîne stéréo ne me fasse sursauter pour avoir lancer un succès signé Elton John à plein volume. Et là, j’ignore ce qui me fit le plus rire. C’était sans doute la réaction qu’il eue, d’abord de devenir complètement rose, puis rouge de gêne (ne m’entendait-il pas chanter du A-Ha à pleine gorge lorsque je décidais de me mettre au ménage de l’appart?!). Ou plutôt, lorsqu’il se lança corps et âme vers la télécommande, prêt à appuyer sur tout ce qui semblait être de près ou de loin un bouton dans l’espoir de faire taire la musique ambiante. Malgré tous ses bons efforts, j’appréciais bien la trame, si ce n’est que « Cette musique… ce serait un excellent moyen pour la concierge de remarquer qu’on est bien là. » je feins la peur, regardant par-dessus mon épaule au cas où elle serait entrée derrière nous sans nous avertir, mais nous étions bien seuls. « Donc, je disais; je m'appelle Elton. ». je pouffai, il était adorable. « Enchantée! » j’esquissai une petite arabesque, souriant de le voir se décorer d’une guirlande qui traînait. « Et moi, Madonna! » je lui tendis la main, sérieuse.

J’espérais qu’il passe Vogue une fois son CD classique Elton écoulé, mais rien ne sembla lui donner envie de suivre mes demandes secrètes. Je me rembrunis donc, le suivant alors qu’il détaillait le rayon des breuvages allant avec mon p’tit dessert sucré. Et ça me frappa. On était le week-end après tout, non? « Le jus de thé me semble très tentant, j’t’assure, mais… tu m’attends une seconde? » De le voir las, et même si je le connaissais à peine j’arrivais très bien à remarquer quelqu’un qui avait besoin de s’écraser sur le sofa et de relaxer, en mode je me fiche de tout je veux seulement rire un bon coup pour tout faire passer, me donna l’idée du siècle. Une autre, tiens. Après m’être excusée, je filai en trombe chez moi, traversant le couloir en regardant à deux fois de chaque côté au cas où une mauvaise surprise m’attendrait au détour, puis passai par la cuisine, le salon, et même ma chambre – tiens, il fallait vraiment que je lave des vêtements, ils prenaient la poussière au sol comme personne -, avant de me reposter devant lui, comme si de rien n’était. Tout sourire, j’avais là le parfait kit du samedi, allant à merveille avec sa mine défaite et mon envie de toujours en faire trop alors que je ne connaissais même pas le nom exact du type. Juste son alias fictif. « Je t’inviterais à passer au salon. » que je lançai, me voulant mystérieuse, m’assurant de lui suivre pour qu’il ne voit en rien de ce que je cachais derrière mon dos.

« Voyons voir ce qu’on a ici… » je levai la tête vers lui, amusée, avant de m’installer au sol face au canapé où il venait de prendre place. Et tour à tour, je dévoilai mon magot : « Du vin, parce que clairement, il n’y a rien qui s’accorde mieux avec mes cupcakes qu’une bonne coupe de rouge. » je déposai la bouteille sur la table basse, convaincue. « Une activité créative recherchée pour nous aider à passer le temps, et surtout à financer notre prochain paiement mensuel d'appart. » je me voulais mystérieuse, déposant maintenant une pelotte de laine et quelques aiguilles, candidement prête à tricoter des foulards et à les vendre au plus offrant pour amasser un semblant d’argent. Puis, la finale, je me levai, confiante, me dirigeant vers la chaîne stéréo « Et un CD d’Elvis, parce que sans vouloir faire de peine à Elton, si on veut vraiment se mettre dans l’ambiance festive y’a pas mieux. »  je pointai du menton la guirlande qui ornait toujours son cou, avant d’ajouter « Bon d’accord, t’as clairement une longueur d’avance sur moi côté esprit des Fêtes! » Confiante d’avoir le plan parfait pour lui – me – changer les idées, je déposai le CD d’Elvis près de celui d’Elton, comme s’il attendait son tour, puis fit volteface. Esquissant quelques pas de danse alors que d'autres notes résonnaient, je m’approchai ensuite de la bouteille de vin, espérant qu’il était du type vin rouge comme moi, et non vin blanc. Ou pire, rosé. M’enfin, on n’aurait qu’à mélanger dans sa coupe un trait d’eau de thé et on arriverait à un beau rose perlé si c’était ce qu’il voulait. « T’aurais deux coupes? » que je lui demandai, m’installant à ses côtés sur le sofa. Avoir improvisé ce genre d’après-midi avec Ash, j’aurais snobbé les verres et on aurait bu à la bouteille, mais c’était autre chose. Et puis mine de rien, en le suivant des yeux, je me confirmai que ça me faisait du bien. De sortir de chez moi, et de sortir de mon cercle d’amis habituel. J’adorais les Monaghan, mais depuis mon retour je n’avais pas fait le moindre effort pour aller à l’extérieur du clan, découvrir de nouvelles têtes. Après avoir passé deux ans à parler à tout le monde à travers la planète le choc était plutôt dérangeant, et Elton/mon voisin était à l’instant ce qui se rapprochait le plus d’une potentielle connaissance, et même d’une possible amitié, si je continuais de jouer la carte des desserts. M’enfin, je l’espérais.

« C’est sympa de m’accueillir chez toi, hen. » souriante, je fixai maintenant la laine. « Alors, foulard ou couverture? »

Oh!Darling


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MessageSujet: Re: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyDim 2 Mar - 2:37



jaime & isla ✖ Don't cry over spilled milk.
Wipe it up and pour yourself another glass.


Madonna. Duh. Je cligne des yeux et j'ai 15 ans, je saute avec Abby sur le canapé Boca déglingué qu'on a mystérieusement trouvé au bord d'un champ et qu'on a traîné jusqu'à ma chambre il y a quelques mois de ça et je m'époumone sur Like A Virgin en coeur avec Bridget Jones et ses compagnes de cellule thaïlandaises. J'efface méticuleusement de ce souvenir Ryan qui entre dans la chambre au moment où Abigail me passe son soutien-gorge sur les épaules pour me Bridgeter dans les règles de l'art et qui vire au rouge moquerie pour ne me concentrer que sur elle, la rousse, ma rousse, qui rit aux éclats quand je blêmis et qui reprend, l'air de rien, son imitation parfaite de la troqueuse de cigarettes du film en entonnant un Like a wersion, fucked for the vely first time qui nous enfonce un peu plus encore. Oui, je me focalise sur elle et je sens un sourire se pointer sur mes lèvres, mais il perd tout de sa superbe en y franchissant la lourde barrière qui s'y est posée, mine de rien, durant ces quelques dernières semaines passées dans l'ignorance, et il en ressort comme un peu trop triste pour valoir la peine de perdurer. Je reviens à l'instant présent et je file vers la cuisine pour offrir de quoi s'abreuver à la Ciccone sans m'attarder, peut-être en me disant, au fond, que je trouverais là un moyen de m'échapper de ces pensées qui, inéluctablement, s'entêtent à tourner de la cruelle absente aux cheveux gingembre. Sauf que voilà, à peine ai-je eu le temps de proposer du thé à la pâtissière de mes voisines que je la vois par-dessus son épaule, là derrière, à se bidonner  et à froncer son nez tâché par la rousseur quand elle décrétera que je serai bien dans la mouise si Madonna accepte le thé et que je me retrouverai à devoir combattre un haut-le-coeur en sortant de sa boîte un de ces sachets qui n'ont rien d'anglais et que je tiens en sainte horreur depuis que l'on s'est expatrié de ce côté de l'océan. Mais la brune me répond avant que je puisse mettre trop de détails sur la projection que je fais de ma colocataire et cette image s'évanouit, s'éparpillant en un millier d'infimes petites particules scintillantes dans un pouf! presque trop distinct pour que je ne le cantonne qu'au fruit de mon imagination; je vrille mes prunelles fatiguées, à tous les degrés envisageables, sur elle et revient à la réalité lorsqu'elle rebrousse chemin et s'évapore, à son tour, de mon champ de vision. N'ayant pas eu la délicatesse de me crocher à ses paroles lorsque je rêvais à la potentielle réplique d'Abigail si elle n'avait pas été à l'hôpital (ou Dieu sais-je où, tiens - et hop, un nouveau petit tour et demi de couteau dans la plaie pour la route!), je la regarde disparaître dans l'embrasure de la porte sans vraiment savoir à quoi m'en tenir.

Je ne me démonte pas pour autant - enfin, pas plus que d'habitude, s'entend : elle n'aurait pas été la première à filer à l'anglaise au milieu d'une conversation ou quelque chose qui s'en rapprocherait. Un truc, un don, une prédisposition à mettre les autres mal à l'aise me collait à la peau depuis bien trop longtemps pour que j'ose encore m'offusquer ou rien que mimer la surprise dès qu'on s'arrangeait pour me laisser là, en plan, en bredouillant une excuse bidon - même pour moi, c'est pour dire! - ou en n'en prenant pas même la peine. Ce n'est pas pour autant que cela me ravirait, avoir un peu de compagnie ne m'aurait pas fait de mal; depuis que je n’avais plus que les chats pour partager mes Aloo Palak et autres, rares, plats que je ne carbonisais pas rien qu’en jetant un regard furtif au four de la cuisine, je n’avais guère plus de contacts avec les autres. Bien sûr, il restait ma barista préférée du café de l’angle, le comique portier du studio et Gary et deux ou trois personnes qui bossaient sur mon émission… Mais tiens, voilà que je me rappelle que je me suis fait viré de mon émission et que j’ai ordre de me remettre d’aplomb avant de m’y repointer. Dormir. Voilà ce que je m’apprêtais à faire, dormir. M’élancer sur mon lit, rebondir précautionneusement et enfoncer ma tête dans mon oreiller pour le mouiller d’un décilitre ou deux de bave. J’avale ce qu’il me restait de mon cupcake – quoique, ce n’est peut-être plus le même, il paraît que j’ai la goinfrerie facile lorsque je suis à l’ouest… enfin, à l’extrême ouest – avant de frotter mes mains négligemment sur mon pull et de reporter mon attention en direction de la chambre et du chemin que je dois emprunter.  Toutefois, je n’ai pas le temps de me plonger dans ma routine d’analyse approfondie des risques et dangers de me faire un croche patte dans un tapis, sur un pied de meuble ou contre un mystérieux obstacle invisible qui va de paire avec ma maladresse : la brune est de retour. « Je t’inviterais à passer au salon. » Mes lèvres de fendent à nouveau, mais d’une façon plus brillante, plus chaleureuse, ce coup-ci. Donc, elle n’avait pas pris ses jambes à son cou. Ou alors, elle venait d’être prise de remord. Ou alors, elle venait juste  récupérer son plateau. Pire, ses pâtisseries. Ou alors… Non. Calm down. Cette fois-ci, j’ai saisi ses paroles, je peux même en déduire quelque chose sans trop torturer mes pauvres petites méninges et puis, même, son air ravi devrait suffire à balayer toute la pelée d’hypothèses qui se pressaient déjà au portillon de mes songes. Je leur coupe l’herbe sous le pied en me concentrant sur les traits de Madonna et je fais perdurer mon sourire avec toute la bonne foi du monde, alors que je suis ses directives et trottine jusqu’au cosy séjour. Enfin ; je me fige quand même à mi-chemin pour revenir sur mes pas et récupérer le plat de ses petites merveilles de sucre avant d’aller me placer sagement sur le canapé.

« Du vin, parce que clairement, il n’y a rien qui s’accorde mieux avec mes cupcakes qu’une bonne coupe de rouge. » Mes lèvres délaissent leur fin dessin bienheureux pour se tordre sur  un Oooh ! qui se veut silencieux mais qui, bien sûr, ne l’est pas, lorsque mes pupilles, brillantes de la curiosité qu’elle a su attiser en moi, se posent sur la bouteille qu’elle sort de derrière son dos. « C'est presque 16 heures, en plus, et 16 heures, c'est bien connu, c'est wine time. » Ou pas. Je sens les dizaines de petits Colostream Guards qui font leur ronde dans ma tête se figer et les poils d'ours de leurs bonnets noirs s'hérisser sur le champs. Qu'est-ce que je raconte ? Je me pourfends en excuse, voilà que je me mettais à penser comme un vulgaire Irlandais. Mon regard se baisse d'instinct vers mon pull et j'y croise le regard de Bono. Damn! Me voilà dans un guet-apens. Une grimace anime mes traits et j'attrape un nouveau cupcake dans la folie de l'instant, mon rythme cardiaque criant pour une nouvelle dose de drogue pour mes artères. « Ouais, 'fin, le vin, c'est quand même pas très sain pour la santé. J'veux dire, ch'est plein de chucre et le chucre ch'est... » Ma voix meurt et mes papilles se réveillent, alors que j'ai à nouveau la bouche pleine sans que j'aie compris comment. Ma bataille pour contenter et les gardes de la reine et le leader de U2 va s'avérer vaine, je le sais, je le sens. Presque autant que celle que je menais encore un peu plus tôt pour cacher à ma voisine à quel point ça ne tourne pas rond, mais vraiment, vraiment pas rond là dedans. Heureusement, elle enchaîne déjà sur le reste de ses provisions de guerre et je la regarde, déglutissant avec difficulté. Je hausse déjà un sourcil quand je la vois brandir des aiguilles et des pelottes de laine - des aiguilles, Madonna ? des aiguilles ? Si Abby avait été là, l'alarme anti-terroriste résonneraient déjà dans tout le comté de Los Angeles. Mais elle n'est pas là et, oui, quatre longues pointes acérées se trouvent désormais à la portée de mes deux mains tellement gauches qu'elles ont été baptisées Lénine et Trotski. Je n'ai pas le temps de blêmir et revoir la syntaxe de la plaidoirie que je devrai faire devant les jurés de mon procès pour génocide à l'aiguille à tricoter que la brune a la bonne idée de rebondir sur autre chose. Moins pointu, plus rond, moins dangereux, terriblement plus rockabilly. J'oublie toutes les scènes d'horreur sanguinolentes qui se profilaient déjà à l'horizon pour les applaudir, elle et Elvis, d'une main et demie - ben, ouais, pas fou, je n'allais quand même pas écraser ma moitié de cupcake restante.  « J'suis certain que Captain Fantastic serait ravi de partager une scène avec le King, alors ne t'inquiètes pas pour lui! » Je ne saisis pas vraiment son allusion suivante, mais je n'en dis rien, préférant lui sourire de toutes mes dents et replacer mon écharpe de guirlandes qui glisse sur mon épau... oooh.

« T’aurais deux coupes? » « Bien sûr! Tout de suite, Miss Madge. » Ni une, ni deux, je suis debout sur mes deux pieds trop instables et je file déjà... Je file où ? Je n'en sais rien. Je ralentis, une seconde ou deux, le temps de me rappeler que, non, je n'ai pas les coupes auxquelles elle s'attend. Parce qu'ici, on boit du thé, du café, du lait ou du whisky au goulot. Et pas de vin. Je ne m'arrête pas à si peu pour autant; trois pas vers la cuisine, quatre placards ouverts et cinq verres évalués, je reviens tout guilleret vers ma nouvelle amie - oui, c'est adjugé depuis qu'elle a passé (sous la contrainte) le pas de la porte, voyez-vous - avec deux grands verres en main, après une brève escale vers la chaîne audio pour échanger mon CD contre le sien. Je manque de l'écraser en retombant de le canapé, la faute aux cupcakes posés sur la table basse envers lesquels je me montre étonnamment précautionneux, et lui tends l'un des deux verres. « Est-ce que la Princesse Diana excuse le fait qu'il n'a rien d'un verre à vin traditionnel ? » Regard humide, je fais la navette entre le visage qui orne le verre (*) et celui de Madonna. Je décide que tout ça manque d'adrénaline; je risque donc le tout pour le tout et saisis de moi-même la bouteille qui attendait encore sur la table basse. Je m'empresse de remplir son verre - oui, courageux, mais pas téméraire, et, d'expérience, je sais que les probabilités pour qu'un désastre se fasse augmentent drastiquement à chaque seconde où mes doigts restent en contact avec la bouteille. J'enchaîne sur l'autre verre, celui que je me suis approprié parce que, justement, c'est le mien ; ses teintes roses et le "Should have been me" qui le décorent (*) m'ont été attribués au dernier mariage princier anglais, parce que oui, j'aurais fait une bien meilleure princesse que Kate. Fait avéré. « Cheers! » Je lève mon verre, le penche légèrement vers elle, renverse un peu de vin sur le canapé qui en a vu bien trop d'autres pour que je prenne la peine de le remarquer et je le porte à mes lèvres... et cache ma grimace, ma panique, mes yeux qui s'agitent. Déglutis difficilement. Damn, maintenant, je me souviens pourquoi on n'a pas de verre à vin - parce qu'on n'aime pas ça. Allez, avale, ce n'est que du raisin, sûrement coupé à l'essence ou à la javel, mais du raison quand même. Et puis, surtout, c'est un présent de la voisine, alors on s'efforce d'a-va-ler.

« C’est sympa de m’accueillir chez toi, hen. » Je finis ma pâtisserie  - quelqu'un a-t-il tenu le compte ? -  pour effacer pour de bon l'aigreur du vin et ma grimace assortie tout en secouant vivement la tête, de haut en bas, attendant, cette fois-ci, d'avoir libéré mes mâchoires pour lui sourire à nouveau franchement. « Sérieusement, avec des petits chefs d'oeuvre du genre, tu reviens quand tu veux. » Je désigne d'un geste de la main le plateau et en profite pour éloigner discrètement le verre de mes papilles en le posant sur la table. « Pas que sans, tu ne sois pas la bienvenue. Mais avec, c'est très bien aussi. Mais ce n'est pas obligatoire !  C'est juste vachement bon. Mais faut pas te sentir obligée. Tu viens quand tu veux. Ou pas. Avec des cupcakes. Ou du vin. Ou... non, pas de vin... » JAIME, TAKE A DEEP BREATH. Je fuis la brune du regard pour chercher la rousse, prêt à jurer que je l'ai entendue, pour de vrai. Rien à l'horizon; mes yeux atterrissent sur la laine et les aiguilles qu'elle a ramenées, alors que, justement, sa nouvelle prise de paroles les concerne. « Dilemme.  » Je plisse les yeux et prends un air des plus concernés - le pire dans l'histoire, c'est sûrement que ce n'est pas une mimique. All natural. Je me laisse glisser du canapé et m'adosse à celui-ci, une fois au sol, alors que mes mains partent à l'aventure parmi les pelotes. « Avec la température ambiante pour une semaine d'Avent, j'aurais plus pioché dans, j'sais pas, le bikini en laine, tu vois ? » Il suffit que je lève un regard vers elle, rien qu'un instant, pour ponctuer ma phrase, pour que, lorsque je le rabaisse vers mes mains, je constate qu'un monstre noeud s'est déjà formé autour d'elle. Damn, je me, nous pensais pourtant sains et saufs tant que je gardais mes distances avec les aiguilles. Douce utopie. Le chat, que je vois apparaître dans le salon du coin de l'oeil et qui se rapproche n'arrange rien les choses; voulant tendre la main vers lui et sauver les pelotes que j'ai fait tomber par-terre de son courroux on ne peut plus cliché, je ne fais qu'emprisonner un peu plus mes poignets dans la marmelade de fils que j'ai créée à une allure défiant toute concurrence. Fronçant les sourcils et ronchonnant quelque chose, les yeux rivés sur le piège qui se referme sur moi, je n'en oublie pas pour autant mon besoin maladif de parler. « J'te présente le chat de ma colocataire. Il s'appelle Morrissey. » Je marque un temps d'arrêt, encore plus pris par mes noeuds, à tous les sens du terme; résigné, je finis par lâcher un petit soupir, tout doux, avant de laisser partir ma tête en arrière pour reposer mon regard sur Madonna. « Et lui, c'est pour de vrai, son nom, cette fois-ci. » J'affiche un sourire au coin de mes lèvres, qui a vite fait de se propager plus loin. Oui, j'avais saisi que son nom était aussi véridique que celui par lequel je m'étais présenté, plus tôt. « Jaime. » Je lui tends la main - enfin, le paquet de mains, laine (laines, même) et noeuds auquel je vais, visiblement, devoir me faire, puisque je ne peux justement pas m'en défaire. Reprenant une position correcte, j'attrape une nouvelle gourmandise avec le peu de dextérité qu'il me reste - oui, encore moins que d'habitude, si, si - puis reprend la parole, sur le ton musical qui va avec. « Enfin, bref. Foulard ou couverture, je te laisse le choix, tant que ça s'accorde avec mes Blue Suede Shoes... Je marque un temps d'arrêt, examinant cette fois-ci avec attention le glaçage qu'elle a posé sur le merveilleux petit muffin (j'ai la fierté de vous annoncer que l'étape 1, "Gavage", est officiellement passée) avec de grands yeux. ... et que je ne coure pas le risque de finir complètement emmailloté d'ici cinq minutes. J'te fais confiance ! »




Dernière édition par A. Jaime Alworth le Dim 4 Mai - 20:29, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA   Don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass. – JAIME & ISLA EmptyMer 9 Avr - 3:43


Jaime & Isla
don't cry over spilled milk. Wipe it up and pour yourself another glass.


J’arrivais à peine à retenir ma joie et je sentais déjà un énorme, énorme sourire contagieux se dessiner sur mes lèvres rosies par l’amusement. C’était qu’il était encore plus expressif que moi, et ça, c’était pas peu dire. Je l’imaginais déjà plutôt extraverti, abonnée involontairement pour ensuite devenir accro de son émission bien particulière de radio – résultat inévitable de mon insomnie légendaire –, j’avais eu le loisir de l’entendre s’élancer dans tous les débats, une fois le micro rien qu’à lui. Mais à l’instant, il surpassait ce que nos brefs échanges dans la cage d’escaliers, au détour d’un couloir ou même au supermarché auraient pu déceler. Ce mec avait une énergie d’enfer, et même s’il semblait ne pas être à pleine capacité à l’instant, je sentais que quelque chose clochait mais j’arrivais pas à mettre le doigt dessus, j’en redemandais encore. Rares étaient ceux avec qui je pouvais vraiment partir dans tous les sens, dans tous les délires. Avec Ash, ça avait toujours été naturel parce qu’elle et moi, on se connaissait depuis si longtemps que tout pouvait facilement être tourné à la blague selon un souvenir de nos vies d’avant. Avec Deklan aussi, j’avais cette facilité à rigoler à outrance et à imaginer les pires histoires, mais c’était le cas bien avant que je parte, alors que tout était plus facile. Maintenant, ben, j’vous passais les détails. Le voisin était donc l’un des seuls prospects que j’imaginais déjà pouvoir postuler au rang de pote déjanté. Le vin et le kit à tricoter prenaient à eux seuls tout leur sens, me disant qu’il s’agissait là d’une activité particulièrement géniale pour passer le temps de façon utile MAIS SURTOUT pour apprendre à connaître le personnage. Aussi distrayant soit-il, j’étais persuadée qu’il avait des choses à raconter et bon, journaliste un jour journaliste toujours, je mourrais de les découvrir. Un regard rapide à gauche et à droite de la porte de mon appart me confirma que la voix était libre – je plancherais une autre fois sur une nouvelle excuse pour feindre l’oubli du paiement mensuel – et je filai comme une flèche vers l’embrasure d’où j’étais sortie tout aussi vite quelques minutes plus tôt.

« Chériiii, je suis rentrée! » que je blaguai, pointant mon nez dans la cuisine pour le retrouver dans la position quasi exacte dans laquelle je l’avais laissé, c’est-à-dire le pichet affectueusement nommé jus de thé encore entre les doigts. Doucement, je disposai de l’étrange liquide avant de l’inviter au salon, tout sourire. Il y avait des moments qui ne s’expliquaient pas, souvent parce que la spontanéité y était pour beaucoup, surtout parce que ces petits surprises, ces petites perles qu’on croisent à un moment ou à un autre de notre vie ne s’expliquent pas. Parce qu’on en profite, pour se dire quelques années plus tard : ouais, tu te souviens quand on est partis en vrille et qu’on a décidé de klaxonner à toutes les voitures rouges qu’on croisait? En rigolant. Sa tronche dépassée, mon envie – besoin – d’élargir mon cercle d’amis et notre activité de grand-mère étaient les pierres angulaires de ce truc. J’aurais pu le prédire là, comme ça. « C'est presque 16 heures, en plus, et 16 heures, c'est bien connu, c'est wine time. » qu’il ajouta, lorsque j’exhibai d’abord la bouteille opaque, prête à être ouverte en guise de signal de départ. « Ouais bon tu m’aurais dit non, j’aurais transformé le tout en sangria et ç’aurait passé inaperçu aussi, hen. » m’amusai-je à répliquer, joueuse, bien convaincue que peu importe l’heure, un cocktail ne fait jamais de tort, surtout entre deux presqu’inconnus. Il en rajoute avec le fait que le vin est bourré de sucre, j’hausse le sourcil en le voyant regarder avec des yeux brillants ce qui reste de mes cupcakes et on est quittes. Pour cette ronde-ci.

Les aiguilles et la laine bien en vue sur la table basse, je prends un petit moment pour le laisser digérer le planning imposé. Bon. J’avoue que j’y suis peut-être allée un peu fort, mais dans un sens, s’il avait voulu me chasser vite fait, il se serait probablement occupé simplement de verrouiller la porte d’entrée, prétextant par un miaulement lorsque j’aurais été de l’autre côté à l’appeler que plus personne n’était à la maison. Mais il était toujours là, à me fixer, à fixer le tricot, à m’autoriser une touche d’Elvis, à essuyer les restes de glaçage qui ornaient ses lèvres tremblotantes. Relaxe Isla, que je me répétai, comme si j’étais une gamine débarquée tout de go dans une nouvelle classe avec des tas d’élèves à impressionner pour récolter un semblant de bonne réputation d’ici la récré. Les enfants m’adoraient, le voisin n’avait aucune raison d’en faire autrement. Nah? « J'suis certain que Captain Fantastic serait ravi de partager une scène avec le King, alors ne t'inquiètes pas pour lui! » Ah tiens, un duo qui mérite d’être mentionné. Je rigolai à l’image, avant de le voir se lever d’un bond avec pour mission de joindre l’utile à l’agréable : d’abord pour aller d’un pas décidé à la recherche de coupes pour le vin – de simples tasses à café auraient pu faire l’affaire, j’ai bêtement oublié de préciser – ensuite pour s’occuper de la suite musicale de l’après-midi. Adossée au canapé, je m’adonnai discrètement à le suivre des yeux, me rendant compte qu’au final, on s’en sortait bien pour deux inconnus. Presque comme si on n’avait fait ça toute notre vie. C’était marrant, mais sa personnalité atypique me calmait. Probablement que peu avaient pensé un truc du genre, mais à le voir s’agiter dans un sens ou dans l’autre, je respirais bien. Pour sûr, y’avait pas plus honnête et plus authentique que lui. Je l’adorais déjà.

« Est-ce que la Princesse Diana excuse le fait qu'il n'a rien d'un verre à vin traditionnel ? » Je l’avais vu revenir lentement au salon, brandissant deux verres aux illustrations que je n’arrivais pas bien à distinguer sans que j’aie à plisser les yeux… ah. Ahah. Ahahaha. « Tu rigoles?! C’est pas tous les jours qu’on peut déguster un pinot avec une princesse! » Rares, nulles, avaient été les occasions où j’avais eu la chance d’être accompagnée de Lady Di à l’heure de l’apéro et je m’esclaffais déjà, le verre en main, de la chance d’être tombée sur un anglais typique, qui s’assumait dans tout le kitsch de la chose. Bon, mis à part cet épisode, il ne semblait pas non plus trop au bord du cliché, je n’avais pas encore remarqué de statuette en plastique de la reine agitant la main sous la force de l’énergie solaire, mais tout de même, il marquait des points côté sens de l’humour. Je me replaçai sur les coussins qui m’assuraient confort au sol avant d’ouvrir agilement la bouteille. Premier toast, première gorgée, j’évite de justesse les quelques gouttes qui éclaboussèrent notre cheers bruyant avant de prendre une longue gorgée, pas partuclièrement étonnée par le goût du vin. Bon, d’un autre côté avec mes moyens de fille paumée, je n’arrivais pas à m’offrir des bouteilles hors de prix et souvent c’était le bas de gamme au supermarché qui écopait, mais au moins, en me fiant à l’esthétique de la bouteille, je m’assurait presque toujours de faire des choix pas si mal. Ce n’était donc pas l’un des grands crus auxquels j’étais habituée lors des événements mondains que je devais couvrir – par chance pour le portefeuille – mais ce n’était pas la fin du monde non plus. Je levai les yeux vers le pote-en-devenir, qui semblait avaler difficilement la chose et me retint d’éclater. « Habituellement, j’y vais avec une paille. C’est plus rapide! » que je blaguai, amicale, lui filant un coup d’œil. « Si tu veux, on peut passer tout de suite à l’option sangria aussi… » bah quoi? On n’allait pas gaspiller la piquette, même si toute seule elle n’était pas particulièrement révolutionnaire.

« Sérieusement, avec des petits chefs d'oeuvre du genre, tu reviens quand tu veux. » me confirma-t-il, alors que je le remerciais de m’avoir fait une petite place chez lui, comme ça à l’improviste. « Pas que sans, tu ne sois pas la bienvenue. Mais avec, c'est très bien aussi. Mais ce n'est pas obligatoire !  C'est juste vachement bon. Mais faut pas te sentir obligée. Tu viens quand tu veux. Ou pas. Avec des cupcakes. Ou du vin. Ou... non, pas de vin... » Là, j’y arrivais plus. Je pouffai de rire, me reconnaissant que trop bien dans sa suite de paroles sans fin. Et si on avait été des jumeaux, séparés à la naissance? Comme les jumelles Olsen? Je me contentai d’hausser les épaules, avant de conclure « Je m’assurerai de prendre ta commande avant chaque visite, comme ça, pas de déceptions que du bonheur! » Note à moi-même : penser à alléger en beurre la prochaine fournée de cupcakes que je lui apporterai. Rien qu’à y penser, et en forçant mes tables de multiplications qui étaient loin, très loin dans ma tête, je comptais qu’à ce rythme, d’ici 2 mois il aurait ingéré plus de… kilos… j’avalai encore un peu de vin, me disant que notre prochaine activité commune entre voisins pourrait se résumer à un bon vieux jogging autour du quartier. Je le vis se glisser à mes côtés, fixant maintenant la laine, lui aussi en plein dilemme à savoir si le foulard ou la couverture s’avérait être le meilleur plan, avant de jazzer la chose en proposant le bikini de laine. Pas bête que je pensai, en hochant la tête, convaincue. J’allais même lui proposer d’y aller all in en tricotant un couvre-parasol assorti aux bikinis laineux avant qu’il ne se foute les mains dans les pelottes, emmêlant j’ignore comment les fils au point de s’en faire un casse-tête japonais. Une minute, une minute seulement et il venait d’ajouter une étape de plus à notre pm improvisé : jouons à déprendre les poignets de l'anglais!! « Oh, la bonne technique pour se tricoter rapidement des mitaines! » que je tentai, approchant doucement mes doigts du piège pour tenter le tout pour le tout. Peine presque perdue, je fronçai les sourcils, entendant un miaulement au loin qui attira mon attention. Oh, oh,.... éternuement. Inévitable.

« J'te présente le chat de ma colocataire. Il s'appelle Morrissey. » je murmure un enchanté au félin qui se tient en retrait, visiblement au courant de mes allergies, ou alors très peu impressionné par notre capacité à tricoter… quoique ce soit. « Et lui, c'est pour de vrai, son nom, cette fois-ci. » Je m’en doutais bien, et puis notre inspiration musicale devait bien prendre une pause à un moment ou à un autre. Jaime – yé, un nom! – se présenta à son tour et je conclu le tout en ajoutant un « Isla! » bien senti, faufilant mes mains à travers la laine pour tenter de serrer les siennes en guise de présentation officielle. Vous le trouvez marrant, mon voisin? « Enfin, bref. Foulard ou couverture, je te laisse le choix, tant que ça s'accorde avec mes Blue Suede Shoes... et que je ne coure pas le risque de finir complètement emmailloté d'ici cinq minutes. J'te fais confiance ! » Challenge accepted. Je levai la main gauche bien en l’air pour lui promettre une sécurité maximale avant de me remettre à la tâche et d’essayer tant bien que mal de lui rendre sa liberté de mes doigts presqu’agiles. « On va d’abord commencer par te libérer de ta prison de laine et ensuite, on pourrait tester un patron de coussin? Nettement plus pratiques, ça nous fera des cadeaux faciles à donner à la famille! » À travers nos échanges, j’ai dénoté qu’il avait mentionné une « colocataire » et mine de rien, je cherchais déjà dans ma mémoire et aux alentours une façon de me souvenir si j’avais déjà croisé la demoiselle. Vite fait, je repensai à une rousse que j’avais vaguement vue à l’arrivée de Jaime dans l’immeuble, mais à bien y penser, ça faisait déjà plusieurs semaines que je n’avais plus entendu son rire cristallin ou croisé sa tignasse rousse dans les escaliers. Curieuse, j’ajoutai « Alors, on lui garde un tricot à la coloc? Ou on l’attend pour lancer l’opération *aiguilles contre attaque*? »

Oh!Darling
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